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Le bloc-notes d'Ivan Rioufol
Publié le 26 octobre 2007
Honorer le courage d'un adolescent Français, fusillé par l'occupant allemand ? Louche. « La meilleure façon de rendre hommage à Guy Môquet c'est de soutenir les sans-papiers », estime un responsable Vert. Marie-Georges Buffet (PCF) embraye sur la résistance contre « les mesures du gouvernement ». Le Syndicat des enseignants (SNES) appelle à ne pas lire l'ultime lettre du jeune communiste, pour refuser l'« instrumentalisation de l'histoire ». Ces confusions contribuent à rendre la France migraineuse.
Amalgames, approximations, faux procès : tous ces ingrédients, déjà observés dans l'argumentaire des belles âmes contre l'ADN comme preuve de filiation, se retrouvent dans les critiques contre l'initiative de Nicolas Sarkozy de consacrer en Guy Môquet, 17 ans, le symbole d'un comportement exemplaire. La gauche aime les « devoirs de mémoire » quand ils sont repentants, mais les trouvent suspects quand ils promeuvent une fierté nationale.
Le dénigrement d'une décision venue de la droite ne suffit pas à expliquer le charivari de cette semaine. L'épisode révèle, plus gravement, l'état d'esprit d'une partie de la gauche et des enseignants, qui rechignent à transmettre la mémoire française. Déjà, en 2005, ils avaient jugé « idéologique » le projet de faire apprendre La Marseillaise en primaire. Pour eux, le patriotisme est l'expression d'un nationalisme. Un raisonnement caricatural.
Quand Xavier Darcos, ministre de l'Éducation, estime que l'école doit renforcer « la cohésion nationale autour d'une histoire, de valeurs et d'aspiration communes », Nicolas Offenstadt (enseignant à Paris 1) y voit, dans Libération, « un inquiétant mouvement de fond » qui vient contrarier l'aspiration à une « école plus ouverte aux histoires plurielles ». L'idéologie multiculturaliste, qui imprègne l'École, invite la nation à faire profil bas.
Là est le coeur du problème identitaire que la France doit résoudre. Il est posé à la fois par la nouvelle immigration de peuplement et par la détermination de l'Éducation nationale à faire partager une mémoire commune à travers des valeurs aussi universelles que le courage et l'héroïsme. Ces « profs » qui considèrent comme une « propagande civique et patriotique » l'hommage à Guy Môquet ont renoncé à cette mission. Le corps enseignant saura-t-il les marginaliser ?
L'amnésie du PC
A dire vrai : il y avait une raison historique de contester ce lundi dédié au « militant communiste engagé contre l'occupant nazi et le régime de Vichy » (L'Humanité). Guy Môquet, fusillé comme otage le 22 octobre 1941 à Chateaubriant, après l'attentat contre un officier allemand commis deux jours plus tôt à Nantes par trois jeunes communistes répondant à un ordre de Jacques Duclos, n'a lui-même jamais été résistant. Or cet argument n'a pas été soulevé. Quand le PCF accuse le gouvernement de « réviser l'histoire », il parle en orfèvre : une amnésie recouvre l'alliance qu'il défendit, entre Staline et Hitler, d'août 1939 à juin 1941.
Lorsque le lycéen se fait arrêter gare de l'Est par la police française, le 13 octobre 1940, il distribue des tracts dénonçant « des magnats d'industrie » qui « tous, qu'ils soient juifs, catholiques, protestants ou francs-maçons (...) ont trahi notre pays et l'ont contraint à subir l'occupation étrangère (...) ». Non seulement il n'est pas résistant au nazisme, mais il adhère à la stratégie de collaboration de l'URSS avec l'Allemagne. Le 22 août 1939, Moscou a en effet accueilli le représentant d'Hitler, Ribbentrop, en faisant jouer l'hymne nazi « Horst Wessel lied ». De juin 40 à la fin août, le PC a tenté d'obtenir de l'occupant la reparution de L'Humanité, en lui faisant valoir qu'il n'a « pas cédé à la dictature du juif Mandel » et en s'enorgueillissant de ses opérations de sabotage de la Défense nationale (bloc-notes du 15/12/2006). Ces trous de mémoire s'ajoutent à l'embrouillamini des esprits.
Molles exigences
Serait-il honteux d'attendre de ceux qui désirent s'installer durablement en France le respect de sa langue, de ses règles, de son mode de vie ? Le projet de loi sur l'immigration, adopté mardi, surprend par sa timidité : un test de quinze minutes vérifiera « la connaissance rudimentaire du français (500 mots) et des valeurs de la République » du candidat au regroupement familial. Des clandestins pourront être régularisés s'ils occupent un emploi peu demandé. Alors que l'opinion est priée de se passionner, ces jours-ci, pour un Pacte écologique aux craintes incertaines, il serait autrement plus utile de bâtir un Pacte républicain, actuellement réduit au minimum.
En fait, ces molles exigences face à la pression migratoire extra-européenne s'emploient à ne pas trop heurter le discours en vogue sur le métissage des cultures. Mais cette utopie impensée du grand brassage contredit le respect de l'identité nationale, ce ressort de l'élection présidentielle. « On se découvre plus vulnérable qu'on ne l'imaginait », a dit Nicolas Hulot, mardi sur Europe 1, parlant de la planète. Une même réflexion pourrait être tenue, parlant de la nation.
C'est d'ailleurs ce que suggère Ayaan Hirsi Ali. L'ex députée néerlandaise d'origine somalienne, cible des intégristes, dénonce dans Le Monde l'impossibilité de « parler librement de l'islam » en Europe et demande à la France « de prendre la tête d'un mouvement visant à faire comprendre à tous les Européens que, ce qui se joue, c'est leur socle de valeurs et de principes les plus fondamentaux ». Au nom des Lumières dont se réclame Hirsi Ali, la nation s'honorerait de l'accueillir comme citoyenne d'honneur et de lui offrir sa sécurité.
Flatter l'islam
A Tanger, mardi, Sarkozy a lancé un appel à bâtir, avec la France, l'Union méditerranéenne. Toujours ce besoin de flatter l'islam.