par Michel Gurfinkiel
Soixante ans après sa création, Israël est un pays riche, futuriste, technologique et gai, mais menacé. Sa jeunesse le sait. A 60 %, elle soutient la droite nationaliste.
Si les jeunes Israéliens de 2008 se retrouvaient dans la situation de leurs grands-parents ou de leurs arrière-grands-parents, en 1948, à la veille de l'indépendance, quel mouvement de résistance soutiendraient-ils ?
La Haganah, l'organisation militaire semi-officielle émanant de l'Agence juive, dominée par les partis de gauche, professant une doctrine de modération stratégique ?
L'Irgoun, issue du sionisme de droite, appelant à une révolte immédiate contre les Britanniques et à la conquête de l'ensemble d'Eretz-Israël ?
Ou le groupe Stern, ultra-nationaliste, prêt à recourir aux méthodes les plus dures pour assurer la création d'un Etat juif ?
Ce sondage a été organisé à la fin de 2007. Les résultats sont éloquents. 40 % des garçons et des filles interrogés ont choisi la Haganah, 30 % l'Irgoun, et 30 % le groupe Stern. En d'autres termes, la ligne dure mène par 60 % contre 40 %.
D'autres sondages portant sur des questions connexes donnent les mêmes résultats. Les jeunes Israéliens votent beaucoup plus à droite que leurs aînés, et manifestent aussi un patriotisme beaucoup plus net. C'est vrai des laïques comme des religieux, des jeunes nés dans le pays comme des immigrants, des ashkénazes comme des aépharades, des garçons comme des filles. La commission Winograd, qui a analysé les défaillances de Tsahal pendant la seconde guerre du Liban, en 2006, a confirmé que les jeunes combattants, qu'ils fassent partie des unités professionnelles, du contingent ou de la réserve, ont eu une conduite au-dessus de tout reproche et un « haut degré de motivation ».
Pourquoi cette radicalisation ? On est tenté de répondre : parce que les jeunes Israéliens ont un cerveau. Le pays dans lequel ils vont grandir est moderne, riche, futuriste, technologique et gai, mais menacé. En 2000, quand il a été élu premier ministre, au suffrage universel, Ariel Sharon avait observé qu'« Israël était confronté à sa seconde guerre d'indépendance ». Huit ans plus tard, c'est toujours vrai. Sharon a eu l'immense mérite de briser partiellement la menace en Cisjordanie. Il a pris, en ce qui concerne Gaza, des décisions risquées qui, entre les mains de ses successeurs, se sont révélées catastrophiques. Début 2008, les nuages noirs s'amoncellent :
Le Hezbollah, au Liban, et le Hamas, à Gaza, ont démontré qu'ils pouvaient frapper la population civile israélienne à leur guise, et survivre. Résultat : les régions qui se trouvent à proximité immédiate de leurs bases se dépeuplent. Cela encourage ces deux organisations djihadistes à frapper plus fort, plus loin. Après Sdérot, c'est Ashkelon qui est touché. Après la Galilée, c'est le cœur démographique d'Israël, la région de Tel-Aviv - Gush-Dan, en hébreu -, qui pourrait se trouver, à court terme, sous le tir de missiles Kassam ou Katiouchas, tirés de Cisjordanie.
L'Egypte, pays arabe soi-disant modéré, ayant signé un traité de paix avec Israël dès 1978, trahit ses engagements, les uns après les autres, avec un cynisme obscène. L'affaire des deux mille pseudo-pèlerins de Gaza en Arabie Saoudite, dont l'Egypte devait garantir la sécurisation [*] et qu'elle a finalement laisser rentrer chez eux sans le moindre contrôle, est exemplaire. Que ce pays ait agi de cette façon pendant la visite privée et officielle du président français sur son territoire ne diminue en rien, on l'aura compris, la gravité de son comportement.
Les Arabes israéliens – 1,3 millions d'âmes, 17 % de la population israélienne – sont en train de passer, corps et biens [**], du côté des extrémistes islamistes et arabes. Le meeting qui s'est déroulé hier à Nazareth, ville israélienne, est révélateur. Une foule qui ne brandit que les drapeaux palestiniens, qui traite les ministres de son pays de criminels de guerre, qui proclame sa solidarité avec le Hamas de Gaza. Aucun pays souverain ne tolèrerait cela. Certainement pas les vingt-deux pays membres de la Ligue arabe ou les cinquante-deux Etats membres de la Conférence islamique.
Le Proche-Orient ne connaît que la force. C'est dommage. Mais c'est comme cela. Si Israël se retire d'un territoire, il n'apparaît pas aux yeux de ses voisins arabes comme mature et généreux, mais comme faible. S'il n'est pas en mesure d'exercer des représailles à l'égard de l'Egypte, celle-ci continuera à le trahir. Si l'Etat juif ne convainc pas ses citoyens arabes de sa volonté politique, ces derniers basculeront définitivement du côté du djihadisme.
Les jeunes Israéliens, eux, savent cela. Ils se battront. Eux seuls méritent notre respect et notre soutien.
source : UPJF