Engage, 28 décembre 2007
http://www.engageonline.org.uk/blog/article.php?id=1572
Les appels au boycott de la droite US contre Sari Nusseibeh ne méritent que
le mépris
David Hirsh (1)
Traduit par Gil pour La Paix Maintenant
L¹organisation sioniste américaine (ZOA) a appelé au boycott de l¹université
Al-Qods de Jérusalem-Est en réponse aux déclarations récentes de Sari
Nusseibeh, président de l¹université Al-Qods.
Appelant ardemment sur Al-Jazira les Palestiniens et le reste du monde arabe
à accepter la création d¹un Etat palestinien à côté d¹Israël, Nusseibeh
avait déclaré : « Les Israéliens vivant actuellement dans les territoires
du futur Etat palestinien devront retourner vivre à l¹intérieur des
frontières de l¹Etat d¹Israël. Aucun Juif dans le monde ne devra avoir le
droit de retourner, de résider ou d¹exiger de résider, à Hebron, à
Jérusalem-Est ou ailleurs à l¹intérieur de l¹Etat palestinien. »
De nombreux blogs droitistes aux USA ont qualifié d¹antisémite cette
déclaration.
Campus Watch semble avoir mis tout son poids pour appuyer ce qui ressemble à
une sorte de boycott universitaire contre l¹université Al-Qods.
Quand Sari Nusseibeh s¹était prononcé en 2005 contre les appels au boycott
universitaire contre Israël, il l¹avait fait avec l¹autorité d¹une des
personnalités les plus influentes de la planète.
Il peut justifier d¹un long et courageux passé de soutien sans équivoque à
un accord de paix avec Israël. En 2005 il s¹est totalement engagé contre le
boycott en signant une motion commune avec l¹université Hébraïque (de
Jérusalem-Ouest). Par ses actes et par ses prises de position, il a fait
tout ce qui était en son pouvoir pour faire obstacle à ceux qui souhaitaient
exclure les Israéliens de la vie universitaire, culturelle et économique du
reste de l¹humanité. Il a publié cette déclaration très claire contre les
propositions de boycott, déclaration lue pendant une conférence sur la
liberté académique à l¹université Bar-Ilan.
L¹engagement de Nusseibeh pour la paix remonte à loin, et il est beaucoup
plus profond que cette seule opposition à la campagne de boycott. A la fin
des années 1980, il a milité ouvertement pour la reconnaissance d¹Israël par
les Palestiniens et a noué des contacts avec des Israéliens, concourant
ainsi au chemin qui a abouti au processus de paix d¹Oslo.
En Palestine, s¹exprimer publiquement sur la reconnaissance d¹Israël ne va
pas sans risques. Le 21 septembre 1987, il a été violemment agressé
physiquement, après une conférence à l¹université de Bir Zeit ou il
enseignait comme professeur de philosophie. Le thème de cette conférence
était la toléranceŠ
En 2002, Nusseibeh a publié, conjointement avec l¹ancien directeur du Shin
Bet, Ami Ayalon, un document qui énonçait les principes d¹un accord de paix
possible entre Israël et la Palestine.
Nusseibeh a l¹habitude d¹être dénoncé comme collaborateur par ceux des
Palestiniens qui rejettent le droit à l¹existence d¹Israël et par leurs
partisans hors de la Palestine, parce qu¹il milite en faveur d¹un accord de
paix avec Israël
Ceux, à l¹intérieur comme à l¹extérieur de la Palestine, qui le dénoncent
comme « collaborateur », mettent sa vie en danger. Maintenant, Nusseibeh
est aussi dénoncé par la droite américaine.
L¹organisation sioniste américaine (ZOA) et Campus Watch ignorent le courage
de Nusseibeh et son engagement contre la diabolisation d¹Israël. Ou alors,
pour des raisons politiques qui leur sont propres, cela leur est
indifférent.
Peut-être ont-ils peur de reconnaître le droit des Palestiniens à
l¹autodétermination, de la même façon que certains Palestiniens ont peur de
reconnaître Israël. En tout cas, il n¹y a pas beaucoup de différences dans
ces attaques au vitriol contre Nusseibeh (venant des deux « camps » - ndt)
Je n¹ai pas lul¹intégralité de l¹interview de Nusseibeh sur Al Jazira, mais
seulement des extraits choisis hors contexte par MEMRI. Or, il est clair,
même en se référant uniquement aux extraits choisis par MEMRI, que ceux-ci
ne sont absolument pas antisémites.
Nusseibeh y argumente en faveur de la solution à deux Etats. Personne ne
pense que la solution à deux Etats puisse être la meilleure imaginable. Mais
toute personne sérieuse sait que c¹est le seul cadre politique possible pour
un accord de paix.
Il est évident que pour qu¹un tel accord soit possible, Israël doit évacuer
les colons juifs, et que la Palestine doit parvenir à un compromis sur le
droit au retour.
Nusseibeh affirme clairement, même dans les extraits de son interview
choisis par MEMRI, que si les Palestiniens veulent une solution à deux
Etats, ils doivent parvenir à un compromis sur la question du droit au
retour. Et il le dit (compromis nécessaire de la part des Palestiniens)
depuis des décennies.
C¹est une déformation malveillante que d¹affirmer que si Israël doit évacuer
les colonies juives créées sous l¹occupation depuis 1967, cela équivaudra à
une espèce de campagne antisémite de nettoyage ethnique.
Ce débat a déjà eu lieu en Israël et il s¹est soldé par la défaite du
mouvement des colons.
Je ne sais pas si Campus Watch et le ZOA tentent actuellement de redonner
vie en Amérique à cette théorie discréditée du mouvement des colons.
La déclaration du ZOA s¹accompagne d¹une liste d¹accusations infondées et
carrément diffamatoires à l¹encontre de Nusseibeh.
Ainsi, ils donnent comme « preuve » de l¹extrémisme » de Nusseibeh, une «
information « concernant l¹année 1991 : « Nusseibeh a été arrêté suite à une
information selon laquelle il aurait rassemblé des informations destinées
aux services secrets irakiens pour les aider à accroître l¹efficacité de
leurs attaques aux Scuds pendant la première guerre du Golfe. »
En fait, à cette époque, Nusseibeh travaillait, en collaboration avec Shalom
Arshav, à l¹élaboration d¹une politique commune condamnant les attaques
contre les civils en temps de guerre. Son arrestation, après ses contacts
avec l¹ambassadeur irakien à Tunis, semble n¹avoir été qu¹une opération
purement politique menée par Israël : aucune charge n¹a d¹ailleurs pu être
retenue contre lui.
Nusseibeh est un philosophe, un universitaire, un opposant aux boycotts
universitaires.
Il a risqué sa vie en s¹exprimant en Palestine contre la diabolisation
d¹Israël et il a également mis sa liberté en danger en militant
continuellement pour la paix pendant plusieurs décennies.
Qu¹il soit bien clair que ceux qui tentent actuellement d¹organiser une
chasse aux sorcières contre Nusseibeh afin de légitimer un boycott
universitaire sont politiquement opposés à un accord de paix entre Israël et
la Palestine.
Leurs arguments sont ceux de la fraction la plus extrémiste des colons.
Ils ne sont fondés sur aucune conception défendable des intérêts d¹Israël
(1) auteur de « Antisionisme et antisémitisme : réflexions cosmopolites »
(2) Voir http://www.lapaixmaintenant.org/article1068
(3) Texte : http://www.lapaixmaintenant.org/communique186
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