« nous ne pouvons vivre comme si nous tolérions de telles infractions, de telles cruautés »
Un article de Ouest-France dont le ton tranche avec celui de la presse habituelle.
samedi 12 janvier 2008
Un otage oublié
Tout le monde l'a oublié. Pourtant, il est vivant et croupit dans une geôle à Gaza. Ce prisonnier est un garçon de 21 ans, Guilat Schalit. Français d'origine, vivant en Israël, il a été enlevé, le 25 juin 2006, alors qu'il effectuait son service dans l'armée israélienne.
Un commando de huit Palestiniens avait attaqué un poste d'observation israélien. Plusieurs soldats israéliens furent tués ou blessés. Guilat Schalit, lui-même blessé, fut alors emmené par les assaillants dans la bande de Gaza. Il a fallu attendre un an pour avoir de ses nouvelles. Jusque-là, les Palestiniens du Hamas s'opposaient à ce que la Croix-Rouge ou toute autre organisation humanitaire lui rendent visite, contrairement aux engagements internationaux en vigueur. Pour sa libération, le Hamas exige la mise en liberté de centaines de Palestiniens condamnés par la justice israélienne pour leur participation aux attentats. Voici donc Guilat Schalit devenu un enjeu de politique internationale.
Bien entendu, le contexte doit être pris en compte. Plaider pour la libération de ce prisonnier n'a pas d'autres raisons que des motifs humanitaires, expliquent les avocats qui ont pris en charge sa cause. Ceux-ci ne représentent ni un quelconque gouvernement ni une quelconque institution, mais seulement une famille abandonnée et maintenue dans l'ignorance du sort de son enfant.
Indépendamment du conflit existant, c'est la question de la prise d'otages qui est ainsi soulignée une fois de plus. Bien sûr - et malheureusement - il existe de nombreuses personnes dans le monde qui, pour des raisons politiques ou financières, sont gardées captives. Leurs ravisseurs exigent, pour leur libération, soit des échanges, soit des rançons, soit des décisions politiques. Mais tout cela est contraire aux droits des gens, au droit international, aux conventions humanitaires existantes. Quelle que soit la motivation idéologique ou non, nous ne pouvons vivre comme si nous tolérions de telles infractions, de telles cruautés. Non seulement parce qu'elles minent le droit - et donc la qualité des relations entre les gens et les nations -, mais aussi parce que, à terme, elles les rendent pratiquement impossibles.
Ingrid Betancourt et Guilat Schalit, otages français
C'est bien aussi pour ces raisons que les avocats du cabinet international, comme Me Emmanuel Altit, s'impliquent dans la défense des otages, comme on l'a vu avec les infirmières bulgares prisonnières en Libye. Ainsi, ils en appellent aux autorités européennes et françaises pour faire pression sur le Hamas, en rappelant à l'Autorité palestinienne que l'Europe reste le plus gros contributeur d'aides.
C'est bien pour cela que des gouvernements, même s'ils ne sont pas directement concernés, agissent en ce domaine. Ainsi, la France avec le président de la République, Nicolas Sarkozy, prenant fait et cause pour les infirmières bulgares, avec le succès que l'on sait.
Bien sûr, il ne faut pas relâcher la pression et donc continuer à agir avec énergie en faveur d'Ingrid Bétancourt, franco-colombienne, traitée de manière indigne depuis six ans par les Farc (Forces armées révolutionnaires de Colombie). C'est pour la même raison que le gouvernement français devrait s'impliquer aussi et tout autant pour obtenir la libération du franco-israélien, Guilat Schalit.
Aujourd'hui, ses avocats demandent des preuves à leurs interlocuteurs palestiniens concernant l'état de santé de Guilat Schalit. Ils exigent des garanties sur les conditions de sa détention. Ils exigent qu'il puisse rencontrer des représentants de sa famille, ses avocats, le représentant du Comité international de la Croix-Rouge et ceux des ONG qui en feraient la demande. Cela, bien sûr, il faut aussi l'exiger pour Ingrid Bétancourt et pour tous les otages, où qu'ils se trouvent.
Une pétition a déjà reçu le soutien de nombreux parlementaires français et européens. Elle exige la libération de Guilat Schalit et, dans ce but, le soutien des autorités françaises et européennes à ses avocats. Ces combats pour la liberté ne sont pas vains. La preuve nous est donnée, ces jours-ci, avec l'heureuse libération qui vient de survenir en Bolivie, démontrant qu'il faut continuer cette lutte, partie intégrante d'une véritable politique de civilisation.
François Régis Hutin
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