« A cet âge, c’est trop traumatisant. » | « Cela n’ajoute rien, hormis du pathos » | « ça peut écraser certains enfants » | « parrainage individuel avec l’horreur. La fréquentation de la mort, c’est compliqué pour un enfant de 10 ans. » |« Je suis d’accord pour aborder cela, mais au même titre que tout le reste. »
Les roquettes tirées sont de type artisanal, et peu précises. Mais depuis six ans, elles ont fait douze morts à Sderot et dans les villages voisins, blessant également des dizaines de personnes et causant plusieurs millions de dollars de dégâts.
Pour les 24.000 habitants de la ville, le plus difficile à vivre, c’est la peur constante, ne jamais savoir quand tombera la prochaine roquette. "Je craque, ça me tue, ça tue ma famille", confie Shulamit Sasson, 44 ans. Les sept membres de sa famille dorment côte à côte sur des matelas disposés dans la salle à manger, proche d’un abri.
Deux de ses enfants ont peur de se laver ou tout simplement de se déshabiller, par crainte de ne pas être prêts en cas d’alerte. Son fils âgé de 13 ans urine dans son slip chaque fois que les haut-parleurs beuglent "tseva adom", c’est-à-dire "couleur rouge", nom de code qui prévient qu’une roquette va tomber dans moins d’une minute.
Ce mois-ci, une roquette a atterri à côté de la maison des Sasson, faisant voler les vitres en éclats. Shulamit Sasson explique qu’elle a été hospitalisée pendant cinq jours sous le choc.
En juillet dernier, le Centre israélien pour les victimes du terrorisme et de la guerre, un organisme à but non lucratif qui travaille avec l’Université de Tel Aviv, a interrogé 500 habitants de Sderot : 91,9% avaient déjà vu une roquette tomber non loin d’eux et 48,4% connaissaient une personne tuée par un tir. Conséquence, 28,4% des adultes présentaient des formes de stress post-traumatique.
"Ce ne sont pas des personnes qui se sentent simplement mal. Elles sont réveillées en plein milieu de la nuit par leurs propres pensées, par leurs propres peurs, par le souvenir de ces peurs", souligne Marc Gelkopf, l’auteur de l’enquête. "Nous parlons de personnes sous pression qui ne parviennent pas à mener une vie de couple. Des personnes qui ne parviennent pas à conserver leur travail".
Shulamit Sasson raconte qu’une roquette est tombée il y a quatre ans près de son fils, Raziel, neuf ans à l’époque, dans une cour d’école. Depuis lors, elle a cessé de travailler et son garçon ne s’en est jamais vraiment remis. "Mon fils va à l’école, entend une sirène, mouille sa culotte et revient à la maison, est-ce que c’est normal ? Un garçon de 13 ans qui a besoin que je vienne avec lui dans la douche, est-ce que c’est normal ? Je dois rester près de lui quand il va dans la salle de bains, est-ce que c’est normal ?" lance-t-elle.
Des jeunes n’ont qu’une hâte : partir. Simha Avraham, 17 ans, s’en ira une fois son diplôme en poche. "Même si c’est tranquille, c’est effrayant. On sait que quelque chose va bientôt se produire", confie-t-elle. Près d’elle, Keren Abuksis, 18 ans, reste silencieuse. Sa soeur aînée a été tuée par une roquette trois ans auparavant.
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