Le fil rouge kabbalistique ?
Souvent interrogé, par les visiteurs de ce site et par des journalistes, sur les origines du fil rouge, porté par les adeptes d'une nouvelle mouvance de la Kabbale, j'ai cru bon de faire une petite mise au point, afin de répondre à l'ensemble de ces questionnements. Et aussi à ceux qui me disent : Comment ! Avec tout ce que tu connais de la Kabbale, tu ne portes pas de fil rouge !
Le fil rouge, ou red string
On a vu, depuis quelques temps, apparaître et se répandre une pratique consistant à porter un fil rouge kabbalistique, préalablement enroulé autour de la tombe de Rachel pour conjurer le mauvais œil. Porter ce fil, pour la modique somme de 26 $ pièce, est aujourd'hui un véritable phénomène de mode. Vingt-six correspondant évidemment à la valeur numérique du tétragramme, mais dans ce cas pourquoi pas 26 cents, ou 86 $, valeur du nom Élohim, ou 216 $ nombre de lettres du Nom explicite ?
Face à l'engouement croissant de cette pratique, je me suis posé la question quant à l'origine de cette pratique, que je ne connaissais pas, et qu'en trente ans de lectures kabbalistiques, je n'avais jamais rencontré. Il m'était bien arrivé d'observer cette coutume chez les tibétains, qui s'attachent traditionnellement un fil rouge au poignet après leurs pujas, mais ce n'est pas de la Kabbale. À la fin de la rédaction de mon livre, Dictionnaire encyclopédique de la Kabbale, je me suis livré à des recherches plus approfondies, car si cela était vraiment une pratique kabbalistique authentique, il aurait été normal que cela y figure.
J'ai d'abord consulté quelques éminents spécialistes, mais personnes n'en connaissait l'origine. Ensuite, j'ai fait une recherche dans les plus grands textes de la Kabbale, pas de fil rouge, pas de h'out édom ! Serait-ce donc une invention de M. Berg et de Mme Madonna ?
Cette pratique a beau se répandre chez de nombreux juifs, il faut, malgré tout, admettre qu'elle n'est signalée nulle part dans la Kabbale. Il n'existe aucune source kabbalistique authentique faisant mention de fils rouges noués autour du poignet pour conjurer le mauvais œil.
Pour être tout à fait honnête, il y a bien dans le Talmud, une petite mention d'une pratique qui consistait à tresser des brins d'herbes et de les porter au poignet, pour se prémunir contre le mauvais œil (que l'on retrouve d'ailleurs dans les pratiques amérindiennes). Mais il n'est ni question de fil, ni de rouge, ni de tombeau de Rachel.
À ce stade de l'article, les inconditionnels du fil rouge, et de Madonna, sont très déçus. Alors, comme je ne suis pas un mauvais bougre, je vais le trouver, leur fil rouge !
Dans le Talmud (Shabbat chap. 7 et
— on ne parle donc pas de Kabbale — il est fait clairement mention du port d'un fil rouge pour conjurer le mauvais œil.
À ce stade de l'article, les opposants au fil rouge sont très déçus... Mais, il faut toutefois préciser que, cette pratique est mentionnée dans le cadre des mœurs superstitieux et idolâtres, ne reposant pas sur la foi. Ce que l'on nomme darké émori (peut-être de la famille de Dark Vador ?). Donc, pratique déconseillée.
Qu'implique le port de ce fil rouge ?
Cela pourrait sembler anodin, mais parlons un peu de Kabbalah maassith, de Kabbale pratique. Maintenant que nous savons que cette pratique concerne spécifiquement le cercle de Kabbale de Yehoudah Berg, nous sommes ici devant un cas typique d'incorporation à un égrégore. Je renvoie à la partie « Kabbale pratique », de mon livre Vie mystique et Kabbale pratique, où je développe cette notion d'égrégore, autour du mot malakh, ange.
Lorsque, au moins, dix personnes se réunissent autour d'une intention commune, un ange, chargé de leur désir et de leur dessin communs, est créé. Afin de maintenir l'existence de cet ange (ou égrégore dans ce cas, puisqu'il s'agit de agrégat de pensées et d'intentions) et d'en développer la force, le groupe doit nommer l'ange et lui offrir des supports d'existence, utilisés par les membres du groupe : parfum, symboles, végétaux, minéraux, tenues vestimentaires et, pourquoi pas, un fil rouge (ou d'une autre couleur).
Ainsi, si le groupe rend publique cet élément, toute personne portant le symbole, participera, sans le savoir, à l'alimentation du golém au service des intentions de ce groupe, et pourra éventuellement en profiter si nécessaire. En sachant que c'est donnant, donnant. Surtout, que la spécificité d'un golém, est de devenir de plus en plus gourmand, afin de grandir en puissance. Cela finit toujours par provoquer une véritable dépendance à cette énergie. Je ne veux pas m'étendre davantage ici sur ce sujet, mais j'ai observé beaucoup de personnes prisonnières d'égrégores, qui ne savent plus comment le quitter et s'en extraire. Surtout lorsque le golém a fini par dominer ses créateurs.
La seule véritable interrogation que j'ai, à ce sujet, est de savoir si Berg et son groupe savent canaliser et maîtriser le flot abondant d'énergie, qu'ils reçoivent de toutes les personnes portant ce fil rouge (vraiment nombreuses). Si c'est le cas, cet égrégore va rapidement se développer et ce mouvement comptera de plus en plus d'adeptes, et durera. Sinon ... (mais en tant qu'ancien courtier, je ne doute pas que Berg ait pris toutes les assurances nécessaires). On pourrait également se poser la question quant à la réaction de l'égrégore du bouddhisme tibétain. Va-t-on assister à une guerre occulte ?
[je ferais remarquer que ce Berg est rejeté par tous les kabbalistes dignes de ce nom...]source :
israel...