Amalek : combat ultime d'Israël
par par Monique Schönberg
vendredi 21 mars 2008 - 00:56
Réflexions autour de Pourim
Dans une étude antérieure, nous avons assisté, à la lumière du
midrash, à l'anta­gonisme qui affecte les relations entre Jacob-Israël et son frère jumeau Esaü, mais également aux sombres projets qui hantèrent les cogitations macabres de ce dernier, appelant l'aide de son "demi-oncle", Ishmaël, pour pouvoir les réaliser.
Nous avons situé Amalek à l' intérieur de cette famille, aux personnages réels mais également emblématiques, nous permettant ultérieurement de poser un regard plus clair sur le destin du peuple d' Israël.
Devant la gravité de la situation actuelle, il m'a paru urgent de mieux cerner Amalek, sa nature et son rôle.
Notre étude se placera continuellement à deux niveaux, car ainsi est fait le monde. En effet nos sages nous expliquent qu'il existe une vision "horizontale" et l'autre "verticale" de l'univers, comme dirait le Professeur Neher,
(zal). On pourrait encore formuler autrement ces concepts : notre monde est une projection, point par point, d'un monde spirituel, qui se concrétise ici-bas. Chaque nation a son ange tutélaire lui correspondant, sa valeur prépondérante qu'il incame, en particulier, à travers son génie culturel propre.
Le fruit d'une frustrationRedéfinissons d'abord qui est l'homme "Amalek".
Esaü, parmi ses femmes cananéennes, avait épousé Ada, qui lui avait donné comme fils Eliphaz
(1). A côté de ses femmes légiti­mes, il aura pour concubine Tim-na, fille d'un prince, Lotan, qui voulut se convertir à la foi en l'existence du D' Un et les patriar­ches n'acceptèrent pas sa de­mande. Elle se tourna alors vers la famille d'Esaù, de par ses liens avec Abraham et s'unit à Eliphaz, lui donnant un fils, Amalek, qui concentra en lui les frustrations de sa mère et la haine de son grand-père. En effet ce dernier se sent grugé par son grand-oncle Jacob, à cause du droit d'aînesse qu'Esaû a malencontreusement vendu à son frère, sans en mesurer totalement les conséquences, entre autre les bénédictions paternelles, qui lui passèrent sous le nez. Celui-ci vouera,
ad-aeternam, une haine féroce à Jacob, largement trans­mise à ses descendants.
Deux textes contradictoires nous sont relatés, à ce sujet-là, par le
Midrash, sous la plume du
Yalkout Reouveni (2) : Eliphaz poursuit Ja­cob dans sa fuite chez Laban, pour le tuer, envoyé par son père. Jacob le met en garde de ne pas exécuter son acte. Eliphaz décide alors de mettre ce projet en suspens et con­seille à son fils Amalek d'attendre la sortie d'Egypte des Hébreux. En effet ils seront ainsi aptes à pou­voir bénéficier ensuite des béné­dictions, quand ils seront en Israël.
Jacob donne naissance à douze enfants, à travers ses quatre fem­mes, à douze tribus et descend en Egypte. Cette civilisation se trans­forme en matrice d'engendrement du peuple d'Israël, résultant de l'éclatement démographique de la famille patriarcale.
L'heure d'AmalekEt Amalek, lui aussi devenu un peuple, attend son heure !
D' frappe l'Egypte et l'anéantit par dix plaies, provoquant l'expul­sion des Hébreux. Les péripéties premières de ce peuple, réduit à l'esclavage, qui goûte les premiers fruits de la liberté, au demeurant encore amers, ne se font pas atten­dre
(3) : il marche et cherche de l'eau, mais celle-ci est arrière. Moïse l'adoucira.
Puis il réclame, à la recherche de nourriture, de
"la viande et du pain" (4). D' suscite des cailles qui volent vers le camp le soir , et le matin de la manne tombe. Par là-même, les Hébreux doivent prendre conscience de la notion de Shabbat et l'intégrer dans leur moi profond, déjà en n'allant pas la ra­masser le shabbat matin, mais en recevant le vendredi une part dou­ble pour deux jours. Et nos sages de dire : si les Hébreux avaient respecté ce premier Shabbat, au­cun peuple n'aurait eu de prise sur eux. Ils continuent à marcher et arrivent à un endroit,
Rejidim, et il n'y a pas d'eau à boire ! Récrimi­nations (!) au lieu de prière. Que d'ingratitude !
Moïse implore D' qui lui dit de frapper le rocher, celui qui abrite un puits, grâce au mérite de My-riam sa sœur. Mais trop, c'est trop ! Les Hébreux ont eu l'audace de dire :
"Hayesh hashem bekirbenon , im ayin ? » (chap 17, v
7) : Y a-t-il D' parmi nous ou pas ?
Amalek guette ! Le moment est propice. Il se jette sur Israël.
Qu'est-ce donc cet endroit, "Refidim"?
Lieux symboliques"She rifou yadaim min hatora" (6) : Les mains se sont affaiblies par rapport à la Thora (traduction littérale).
En effet Amalek, personnage et peuple peu reluisants, qui avait prévenu Laban de la fuite de Jacob et Pharaon de la fuite d'Israël, res-surgit quand Israël prête le flanc à la faute, à l'infidélité, au doute. Les Hébreux venaient de mettre en question, dans l'épisode de l'eau, la protection divine parmi eux.
Amalek s'attaqua en particulier aux gens de la tribu de Dan, affai­blis car impurs de par leur culpa­bilité, ceux qui avaient même été idolâtres et qui sortaient des nuées protectrices qui enveloppaient Is­raël, pour se purifier et étaient alors fauchés par le glaive ennemi.
La valeur numérique des lettres qui foment le nom d'Amalek :
ayin - mem - lamed - kouf, et de celles du mot
safek, le doute, est identique et signifie par là que le propre d'Amalek est de semer doute, discorde et d'inciter Israël à l'éloignement divin pour entraver les liens tissés entre D' et son peu­ple, briser l'alliance qui les unit et ainsi faire capoter le projet divin.
C'est pourquoi il apparaît à la sortie d'Egypte au moment où Is­raël est vulnérable.
Mais dans le Pentateuque, on le voit ressurgir peu de temps avant l'entrée des Hébreux en terre d'Is­raël.
Examinons le contexte (7) : nous sommes à la fin de la qua­rantième année de pérégrinations et Moïse met en garde le peuple devant toute malhonnêteté dans les poids et mesures et Rashi de dire : si tu as menti et que tu as falsifié poids et mesures dans ton com­merce, l'ennemi sera à ta porte.
Ton mensonge appelle celui qui incame le mensonge, à savoir Amalek. Puis le texte biblique continue et rappelle l'épisode du livre de l'Exode.
Rashi (v.18) décrit Amalek, à travers le Midrash suivant : il y avait une baignoire remplie d'eau bouillante et des voyous, mais qui n'osaient pas y tremper leurs pieds de peur de s'y brûler. L'un d'entre eux, plus téméraire, plonge et saute tellement dans cette eau bouillante, qu'il la refroidit et per­met ainsi aux autres d'oser le sui­vre. A l'image de cela, alors qu'aucune nation n'a le courage d'affronter Israël après le désastre infligé à l'Egypte, Amalek ose l'attaquer, calculant son coup et'
entraînant derrière lui les autres peuples, alors que Jethro, qui suit depuis un certain temps les événe­ments sur la scène de l'histoire et comprend qu'il est plus malin de participer à l'épopée d'Israël que de la contrecarrer (raison pour la­quelle il se convertit et aide Moïse. C'est pourquoi la péricope "Jethro" suit le récit de l'attaque d'Amalek dans le livre de l'Exode) (
.
Prémice des NationsAmalek est appelé "Reshit Goyim" : prémice des nations. C'est à dire celui qui sera l'insti­gateur et l'unificateur des forces combattantes contre Israël.
En cela, il ne suit pas les bons conseils de son père. En effet Eli­phaz, qui avait étudié chez son grand-père Isaac qu'il aimait, avait donné les conseils suivants à son fils : (10) le monde futur est pré­paré pour Israël et si tu veux y participer, tu dois l'aider dans sa construction du monde matériel afin qu'il s'adonne mieux à sa vo­cation spirituelle.
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