Hajdenberg : Nous n’admettons pas que l’existence d’Israël soit mise en cause
25/04/08
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- - Thème: France/Israël
Mercredi 23 avril, à l’occasion du 60e anniversaire de l’Etat d’Israël, ITélé a diffusé un documentaire de Gérard Benhamou, « France Israël-je t’aime moi non plus ». Laurent Bazin a ensuite animé un débat sur les relations franco-israéliennes avec comme intervenants Gérard Araud, ancien ambassadeur de France en Israël, directeur général des Affaires politiques au ministère des Affaires, Elie Barnavi, ancien ambassadeur d’Israël en France, et Henri Hajdenberg, ancien président du CRIF.
Henri Hajdenberg est revenu sur le tournant significatif de 1967 marqué par les propos du Général de Gaulle qui avait déclaré : « Les juifs qui étaient restés ce qu’ils avaient été de tout temps c’est à dire un peuple d’élite, sûr de lui même et dominateur. »
L’ancien président du CRIF a rappelé combien ces propos avaient été choquants et violents. « Quand on analyse chaque mot, ça veut dire que le peuple juif, qui a subi toutes les persécutions pendant 2000 ans et notamment dans la chrétienté, a été un peuple dominateur alors que c’était un peuple qui malheureusement a été dispersé, qui subissait l’humiliation dans la plupart des pays, qui a été chassé de terre en terre dans toute l’Europe. » Il s’est étonné, d’ailleurs, que ces mots soient prononcés par le représentant de la Résistance contre le régime nazi tout en signalant que de Gaulle n’a jamais appelé les Français à se mobiliser contre l’antisémitisme dont furent victimes les Juifs en France pendant l’occupation nazie et sous le régime de Vichy.
Pour Henri Hajdenberg, « la phrase du Général de Gaulle marque la fin d’une époque : celle d’une alliance de la France avec Israël ». Une France qui aide ce jeune pays à se construire et à se défendre. En 1967, c’est la rupture. Il s’agit d’un « tournant qui est différent de ce que l’on peut analyser aujourd’hui par rapport à la cause palestinienne, au combat palestinien ». Ce véritable tournant « c’est la fin de la guerre d’Algérie en 1962, c’est un retournement stratégique de la France dans le monde qui est impulsé par le Général de Gaulle ». Henri Hajdenberg a rappellé que le conflit au Proche-Orient ne concerne pas les Palestiniens : « C’est un conflit entre Israël et le monde arabe. Il n’y a pas à l’époque de cause palestinienne qui soit défendue même pas par les Palestiniens et les pays arabes. » Charles de Gaulles a voulu se désengager d’Israël pour « se reconstruire une politique avec le monde arabe après le désengagement à l’égard de l’Algérie ».
L’ancien président du CRIF a également insisté sur la politique française anti-israélienne sous Giscard d’Estaing. La France a eu une politique cynique mercantile basée sur le pétrole et la vente d’armes aux pays arabes. Cette politique a même « mis en danger Israël avec la fourniture par la France d’un centre de recherche nucléaire à l’Irak ».
Enfin, interrogé par Laurent Bazin sur l’ambigüité de la communauté juive qui « serait plus israélienne que les Israéliens » et faisant ainsi référence à la présence des drapeaux israéliens dans des manifestations contre l’antisémitisme en France, Henri Hajdenberg assure que « les juifs français se sentent des citoyens français à part entière » et explique que ce drapeau est symbole. « . Il y a une sensibilité particulière à l’égard de l’Etat juif, qui est un Etat refuge pour tous les Juifs du monde. Le sionisme, c’est la conception qu’il y ait une patrie juive avec l’idée que tous les Juifs, qui pourraient être opprimés, qui pourraient souffrir de persécutions, puissent se retrouver en Israël Il y a eu des moments où les Juifs ont été heureux en France et il y a eu des moments où les Juifs ont été persécutés en France. Ils n’ont pas été persécutés sous l’affaire Dreyfus mais ils ont subi l’antisémitisme anti-dreyfusard. Les Juifs ont subi la collaboration française. La France a été le seul pays d’Europe à collaborer de manière à ce que les Juifs soient arrêtés par la police de l’Etat français de l’époque et qui les a conduits directement vers les chambres d’extermination. Nous sommes aujourd’hui, en tant que juifs, qui vivons dans un pays tout en étant engagés en tant que Français, avec une solidarité effective à l’égard de l’Etat d’Israël pour des raisons qui tiennent à l’histoire. Nous avons, avec les Israéliens, une religion, une tradition, une civilisation communes mais aussi la mémoire des persécutions subies par tous les Juifs au cours des siècles. Nous n’admettons pas que l’existence de l’Etat d’Israël soit mise en cause. »
Photo : © 2008 Alain Azria