Voici le fameux article d'Ha'aretz sur les négociations secrètes entre
représentants syriens et israéliens, artcile cité par exemple dans Le Monde
de cet après-midi]
http://www.haaretz.com/hasen/spages/813817.html
Ha'aretz, 16 janvier 2007
Accord secret entre représentants israéliens et syriens
Akiva Eldar
Trad : Gérard pour La Paix Maintenant
Suite à une série de rencontres secrètes qui se sont tenues en Europe entre
septembre 2004 et juillet 2006, des représentants syriens et israéliens ont
élaboré des accords officieux qui pourraient servir de base à un accord de
paix entre la Syrie et Israël.
Les points principaux de ces accords sont les suivants :
Un accord de principe sera signé entre les deux pays, et après que les
engagements auront été respectés, un accord de paix sera signé.
Dans le cadre de cet accord de principe, Israël se retirera du plateau du
Golan sur les lignes du 4 juin 1967. Le calendrier de ce retrait reste
ouvert. La Syrie a exigé que le retrait s'effectue sur une période de 5 ans,
Israël a demandé que le retrait s'étale sur 15 ans.
Dans la zone tampon, le long du lac de Tibériade (Kinneret), un parc
naturel sera établi, à l'usage des Israéliens et des Syriens. Ce parc
couvrira une portion importante du plateau du Golan. Les Israéliens auront
un libre accès au parc, qui ne dépendra pas de l'autorisation des Syriens.
Israël conservera le contrôle de l'utilisation des eaux du Jourdain et du
lac.
La zone frontalière sera démilitarisée selon un ration de 1 pour 4 (en
termes de territoire) : 1 pour Israël et 4 pour la Syrie.
La Syrie acceptera de mettre un terme à soutien au Hezbollah et au Hamas,
et prendra ses distances avec l'Iran.
La carte de ces accords est disponible sur le site d'Ha'aretz, cité au
début de cet article. Ce lien marchant assez mal, vous pouvez en faire la
demande en écrivant à gerard@lapaixmaintenant.org.
Ce document est qualifié de "non-document", soit un document d'accords
officieux sans signature ni statut juridique. Sa nature est politique. Il a
été élaboré en août 2005, puis affiné au cours d'un certain nombre de
rencontres en Europe.
Les rencontres ont eu lieu avec la pleine connaissance de hauts
fonctionnaires du gouvernement de l'ancien premier ministre Ariel Sharon. La
dernière rencontre s'est tenue l'été dernier, au moment de la guerre au
Liban.
Le gouvernement israélien a été tenu au courant de ces rencontres par
l'intermédiaire du médiateur européen et également par celui du Dr Aron
Liel, ancien directeur de cabinet du ministères des affaires étrangères
[également membre du conseil d'administration de l'IPCRI, ndt] qui a pris
part à ces rencontres.
Le médiateur européen et le représentant syrien dans ces discussions ont eu
huit rencontres distinctes avec de hauts représentants du gouvernement
syrien, dont le vice-président Farouk Shara, le ministre des affaires
étrangères Walid Muallem net un officier du renseignement syrien ayant le
grade de général.
Les contacts ont pris fin suite à la demande des Syriens que ces rencontres
à un niveau officieux soient remplacées par des rencontres secrètes au
niveau de vice-ministre, du côté syrien, et au niveau de directeur de
cabinet d'un ministère du côté israélien, avec la participation d'un haut
représentant américain. Israël n'a pas accepté cette demande.
Le représentant de la Syrie dans ces pourparlers, Ibrahim (Abe) Suleiman,
citoyen américain, s'est rendu à Jérusalem et a remis un message à de hauts
fonctionnaires du ministère israélien des affaires étrangères concernant le
souhait de la Syrie de parvenir à un accord avec Israël. Les Syriens ont
également demandé de l'aide pour améliorer leurs relations avec les
Etats-Unis, et en particulier pour qu'il soit mis fin à l'embargo américain
sur la Syrie.
Pour sa part, le médiateur européen a souligné que le régime syrien est
inquiet de la baisse de ses revenus en pétrole, ce qui pourrait conduire à
une catastrophe économique dans le pays et saper la stabilité du régime
Assad.
D'après Geoffrey Aronson, un Américain de la Fondation pour la Paix au
Moyen-Orient (fondation basée à Washington), qui a lui aussi participé aux
négociations, un accord sous les auspices des Etats-Unis demanderait à la
Syrie de faire en sorte que le Hezbollah se limité à n'être qu'un parti
politique. Il a également affirmé à Ha'aretz que Khalked Mesh'al, chef du
bureau politique du Hamas à Damas, devrait quitter la capitale syrienne.
La Syrie exercerait également son influence pour une solution au conflit en
Irak, avec un accord entre le leader chiite Mouktada Sadr et les dirigeants
sunnites. De plus, elle contribuerait à la solution du conflit
israélo-palestinien, y compris à la solution du problème des réfugiés.
Selon Geoffrey Aronson, l'idée d'un parc naturel sur le Golan permet de
répondre à l'exigence syrienne d'un retrait israélien sur les lignes du 4
juin 1967, tout en écartant les inquiétudes d'Israël liées à l'accès aux
sources d'eau du lac de Tibériade : "Il s'agit d'un effort sérieux et
honnête pour trouver des solutions créatives à des problèmes pratiques qui
ont empêché de parvenir à un accord sous Barak, et pour créer une atmosphère
permettant de bâtir de la confiance entre les deux parties."
Il s'est également révélé que l'un des messages du régime syrien à
l'intention d'Israël était lié aux relations entre Damas et Téhéran. Dans ce
message, le régime alaouite (la famille Assad fait partie de la minorité
alaouite) affirme qu'il se considère comme partie intégrante du monde
sunnite et qu'il est contre le régime théocratique chiite. Il est en
particulier opposé à la politique de l'Iran en Irak. Un haut représentant
syrien a ainsi souligné qu'un accord de paix avec Israël permettrait à la
Syrie de prendre ses distances par rapport à l'Iran.
Aron Liel a refusé de révéler les détails des rencontres, mais il a confirmé
qu'elles avaient bien eu lieu. Il a d'ailleurs ajouté que les rencontres
officieuses constituent un phénomène tout à fait habituel depuis 10 ans :
"Nous avons insisté pour faire connaître l'existence de ces rencontres aux
parties concernées. Toutefois il n'y a eu aucune participation officielle du
côté israélien au contenu des discussions ni au idées soulevées lors de ces
discussions."
Avant ces rencontres, Liel a été impliqué dans d'autres conversations
secrètes entre Israël et la Syrie avec la Turquie pour médiateur, suite à
une requête syrienne adressée par le président Assad au premier ministre
turc Recep Tayyip Erdogan. Cette tentative a échoué après le refus par
Israël d'organiser ces rencontres à un niveau officiel, et après le refus de
la Syrie de restreindre les discussions à un "niveau universitaire",
analogue au cadre des discussions qui avaient précédé les accords d'Oslo.
Il n'y a pas eu de réaction officielle du cabinet du premier ministre suite
à la publication ce mardi de cette information.
[Depuis, Olmert a déclaré avoir appris l'existence de ces rencontres par la
presse et a démenti tout contact avec la Syrie, ndt]