Benoit XVI, pape de la polémique
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Par Nina Levy-Strauss pour Guysen International News
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Mercredi 28 janvier 2009 à 07:53
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La décision papale de lever l’excommunication qui pesait sur quatre évêques traditionnalistes, dont un connu pour ses idées négationnistes, n’en finit pas de créer des remous. Dernière conséquence en date, et pas des moindres, le Grand Rabbinat d’Israël a officiellement décidé de rompre ses liens avec le Vatican. Des tensions qui interviennent à quelques semaines de la visite du Pape Benoit XVI en Terre Sainte. Mais sera t-elle réèllement maintenue ? |
Les évêques concernés par le décret avaient été consacrés en 1988 par Monseigneur Marcel Lefebvre sans le consentement de Rome. Après la réintroduction du rite traditionnel tridentin en latin, ce nouveau geste de Benoit XVI tend à prouver sa volonté de ramener les évêques intégristes dans le giron de l'Eglise.
Seul problème : un des évêques réintégrés par le Vatican est connu pour ses idées négationnistes. Le britannique Richard Williamson soutient les thèses révisionnistes niant la Shoah. Il a contesté à plusieurs reprises l’extermination de six millions de Juifs.
Ses dernières déclarations sont récentes. La semaine dernière, Mgr Williamson a en effet affirmé qu'il n'y avait jamais eu de chambres à gaz et que seuls 200 ou 300.000 juifs ont été exterminés dans les camps de concentration.
Des propos qui, selon le Vatican, n’ont aucun lien avec sa réintégration.
« Les déclarations de Mgr Williamson ne sont en aucun cas partagées par l’Eglise Catholique ou par le Pape, et elles n’ont rien à voir avec le décret émis. Nous devons séparer les deux sujets. D’un côté, la levée de l’excommunication et la réconciliation avec la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X, de l’autre, les commentaires insensés de Williamson » a expliqué le révérend Federico Lombardi, porte-parole du Saint-Siège.
Les responsables de la communauté juive ne sont pas de cet avis. Ces derniers affirment que cette décision aura un coût politique pour le Vatican. Le Mémorial de la Shoah Yad Vashem a ainsi publié un communiqué sur la position de l’Eglise.
Pour l’Institut israélien, même si la réintégration de Williamson n’a aucun lien avec ses propos sur l’Holocauste, cette décision envoie un message peu gratifiant concernant l’attitude de l’Eglise face à la Shoah.
« Nous comprenons que la décision est un problème interne à l’Eglise, mais nous considérons scandaleux le fait qu’un évêque puisse nier la Shoah. Un tel dénie de l’Holocauste est non seulement une attaque aux victimes, mais aussi une insulte aux survivants, une insulte pour les Juste parmi les Nations qui ont risqué leurs vies pour sauver des juifs, et une insulte à la vérité.
Nous savons que le dénie de la Shoah n’est absolument pas une politique de l’Eglise Catholique. Mais nous espérons également que le Vatican engagera une action pour condamner les idées exprimées par un de leurs évêques » a indiqué Robert Rozett, historien et responsable à Yad Vashem.
Même indignation à l’Agence Juive pour Israël qui a qualifiée la décision prise par le pape de « scandaleuse ». Pour Amos Hermon, la réhabilitation de Richard Williamson insulte Israël et les 200.000 survivants de la Shoah qui y vivent. Il attend du Pape une réaction rapide à cette polémique.
« Nous espérons vraiment que le Pape, qui est très sensible à la foi juive et à l’Holocauste, reconsidèrera la décision qu’il a prise. »
Enfin dernier rebondissement en date, le Grand Rabbinat d’Israël a officiellement décidé de rompre ses liens avec le Vatican pour protester contre la décision de Benoit XVI.
Conséquence logique, il a annulé une rencontre prévue du 2 au 4 mars prochain au Saint Siège avec des représentants de la commission chargée des affaires religieuses avec les Juifs. Dans une lettre adressée au président de cette commission, le Cardinal Walter Casper, le directeur général du Grand rabbinat, Oded Weiner a indiqué que « sans des excuses publiques, il sera difficile de poursuivre le dialogue ».
Une déclaration qui plombe sérieusement les relations avec le Vatican déjà fortement assombries par de multiples petits différents entre la communauté juive et le Saint-Siège. Embarrassée par ce nouveau dossier, et désireuse de voir Benoit XVI arriver en Israël, Jérusalem s’est également prononcée sur le sujet, en tentant cette fois d’apaiser les tensions.
Le porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, Yigal Palmor a ainsi affirmé que cette affaire «ne concerne pas les interactions entre les deux Etats ».
Des propos qui intervenaient cependant avant la décision prise par le Grand Rabbinat, instance officielle israélienne, de rompre les ponts avec le Saint Siège