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Par Asil Kami et Missy Ryan
BAGDAD (Reuters) - Les élections provinciales, premier scrutin organisé en Irak depuis 2005, se sont déroulées sans incident majeur samedi, l'ouverture des bureaux de vote ayant été prolongée d'une heure pour laisser le temps à tous les électeurs de s'exprimer.
Ce scrutin s'est déroulé sous une surveillance policière et militaire renforcée tandis que les troupes américaines se sont montrées très discrètes.
Les opérations de vote, dans 14 des 18 provinces du pays, étaient considérées comme un test crucial pour les autorités irakiennes.
"Les doigts teintés de rouge sont de retour pour la reconstruction de l'Irak", a dit le Premier ministre Nouri al Maliki dans une allocution télévisée après la clôture du scrutin, faisant référence à l'encre rouge utilisée pour identifier les votants dans les bureaux de vote.
"Il n'y a pas eu de défaillance dans le système de sécurité", a déclaré le général Mohammed al Askari, porte-parole du ministère irakien de la Défense. "Les choses se sont déroulées comme nous l'avions prévu et comme nous l'espérions."
"Je considère qu'il s'agit d'un grand succès", a-t-il ajouté.
Pour le représentant spécial de l'Onu, Staffan de Mistura, la journée a eu "une portée historique". "Il y a eu un flot de votants, les règles ont été scrupuleusement appliquées", a-t-il dit.
Un tir de mortier a cependant été signalé à Tikrit, la ville natale de l'ancien président Saddam Hussein, mais n'a pas fait de blessé, tandis que les soldats ont tué une personne et en ont blessé une autre dans une querelle dans le quartier populaire chiite de Sadr City à Bagdad.
Si l'ambiance au fil de la journée s'est peu à peu détendue et les mesures de sécurité ont été assouplies, les premières opérations de vote se sont effectuées dès 07h00 du matin en suivant de stricts contrôles.
Les bureaux de vote étaient protégés par des barbelés et les électeurs subissaient des fouilles en règle avant de pouvoir déposer leur bulletin dans l'urne.
DES LÉGISLATIVES À LA FIN DE L'ANNÉE
Les militaires et policiers irakiens entendaient démontrer qu'ils étaient capables d'assurer la sécurité d'une manifestation d'ampleur nationale avant le début du retrait des quelque 140.000 soldats américains.
Les forces de sécurité redoutaient particulièrement des attentats suicides commis à l'aide de ceintures d'explosifs ou des attaques à la voiture piégée.
Les bureaux de vote ont fermé à 18h00 (15h00 GMT), une heure supplémentaire ayant été accordée aux électeurs pour accomplir leur devoir.
Les résultats provisoires devraient être connus dans les prochains jours, les résultats définitifs ne devraient pas être publiés avant quelques semaines.
Après les élections de la fin 2005, les Irakiens avaient vu leur pays s'enfoncer un peu plus dans le chaos et dériver jusqu'au bord de la guerre civile et religieuse mais la sécurité s'est améliorée depuis.
Plus de 400 partis ou mouvements étaient en lice, et 14.431 candidats se disputaient les 440 sièges de conseillers provinciaux en jeu.
"Une simple élection ne fait pas la démocratie; une série d'élections, si", a dit l'ambassadeur des Etats-Unis à Bagdad, Ryan Crocker, dont le pays compte encore 140.000 soldats en Irak.
Le scrutin de ce samedi ouvre en effet un nouveau cycle électoral qui culminera à la fin de l'année par des élections législatives.
Pour de nombreux Irakiens, le simple fait que les élections provinciales aient pu avoir lieu est un motif de soulagement : il y a dix-huit mois, au pire des violences, la perspective de revoter semblait bien éloignée.
"Mes souffrances m'ont poussé à voter", expliquait Asad Wahayab, qui tenait un bureau de vote dans la ville de Bassorah. "Nous avons beaucoup souffert et voilà notre chance de voter pour le changement."
"C'est la première fois que je vote et je suis très excité. J'espère que celui qui gagnera goudronnera la route", a dit un jeune Irakien de 19 ans, dans une ville proche de la frontière syrienne.
Avec Mohammed Abbas et Aref Mohammed à Bassorah, Michael Christie, Wisam Mohammed, Ahmed Rachid, Walid Ibrahim et Khalid al Ansari à Bagdad; Tim Cocks, Fadhel al Badrani et Sabah al Bazi, version française Henri-Pierre André, Eric Faye, Clément Guillou et Pierre Serisier