Dieudonné se redonne en spectacle douteux sous l’œil de Faurisson
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Alors que des jeunes juifs manifestaient, l’historien révisionniste était dans la salle.
Dieudonné-Faurisson, acte II. Comme en décembre, l’historien révisionniste, Robert Faurisson, a assisté au spectacle de l’humoriste donné dans son théâtre de la Main d’Or. Mais jeudi soir, pas de montée sur scène pour le vieil homme de 80 ans, resté sagement assis dans un coin de la salle. Le profil bas était de rigueur.
Pas question de faire de grande démonstration. Même pas de provoquer la dizaine de jeunes de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF) venus en début de soirée tracter pour dénoncer le show «d’une étoile montante de l’extrême droite». Ceux-ci tentent d’instaurer, sans grand succès, un dialogue avec les spectateurs. Blancs d’un certain âge, caricatures de skinheads, jeunes Beurs et Noirs : un casting contrasté. 20 h 30 : le spectacle va débuter. A l’extérieur, la tension monte. «Dégagez, je ne vous écoute pas», lance la serveuse du théâtre aux jeunes juifs. «Nous ne faisons qu’un acte citoyen», lui rétorque l’un d’eux.
Le videur presse les spectateurs de rentrer. En réponse, un homme ramène des fac-similés du quotidien régional La République du Centre : «Il y a soixante ans la fin des camps». «Vous voyez, vous ne pouvez pas nous accuser de négationnisme», ironise-t-il. Quelques heures plus tard, sur ce même trottoir, il s’en moquera : «Ce sont les tracts de l’ennemi, un tissu de conneries. Très drôle.»
«Rats d’Hollywood». A l’intérieur, la salle est comble. La lumière s’éteint et une voix off met dans l’ambiance. Les spectateurs sont priés d’éteindre leur portable «par respect pour toutes les victimes de la Seconde guerre mondiale». Le comédien en remet une couche : «L’UEJF, j’m’en fous, je les emmerde.» Sur les planches, l’ancien acolyte d’Elie Semoun dézingue à tout va devant une salle pliée en deux : les Pygmées, les catholiques, les dirigeants africains corrompus, les serial killers, etc. Tout le monde en prend pour son grade, certes, mais les allusions contre les juifs courent, elles, tout le long du spectacle. Des «rats d’Hollywood» à l’affaire Julien Dray, tous les poncifs antisémites sont exploités jusqu’à la corde. Dieudonné en a après ce qu’il appelle «la fine équipe» : Licra, UEJF, associations des droits de l’homme, etc.
Une heure après la levée de rideau, l’assistant de Dieudonné, Jacky, fait son apparition en robe de chambre rose, ornée d’une étoile jaune. L’étoile pour dénoncer l’omniprésence de la Shoah dans la mémoire collective. La robe rose pour attaquer Bertrand Delanoë, le maire de Paris (PS), qui cherche à interdire l’histrion de tribune publique. Quand Jacky a accueilli Robert Faurisson en décembre, il était vêtu d’un pyjama avec une étoile. Le comédien explique tristement que les policiers ont mis son pyjama sous scellés, et l’ont retenu deux jours, «injustement».
Des provocations pas toujours compréhensibles pour une partie du public. Quand Dieudonné rappelle son «happening» au Zénith, une jeune fille se penche à l’oreille de sa copine et lui demande, entre deux rires : «Mais c’est qui ce Faurisson ?»
Autographes. A la fin du show, après le départ d’une bonne partie du public, un autre spectacle prend forme. Au bar et dans la petite salle de restaurant, les initiés se lâchent : lobby juif, négationnisme, propagande d’extrême-droite, tout y passe. Parmi les convives, se trouvent Marc Robert, Marc George de son vrai nom, ex-candidat FN aux dernières municipales à Nice, Ginette Skandrani, cofondatrice des Verts, exclue pour «cryptonégationnisme» ou encore Michele Renouf, ancienne reine de beauté, connue pour ses propos négationnistes dans diverses conférences.
Mais la vedette est sans conteste Robert Faurisson. Tout le monde essaie de le photographier, mais la garde rapprochée veille et insiste régulièrement pour interdire tout flash. Après avoir signé des autographes, Dieudonné rejoint tout ce monde à une table pour déguster poulet et gambas grillés avec celui qui conteste depuis trente ans la réalité de l’Holocauste.