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Lettre ouverte au camarade Olivier Besancenot
04/02/09
- - Thème: Antisémitisme
Lu dans le mensuel Les Nouvelles d’Arménie, à la veille de lancer son Nouveau parti anticapitaliste, une interview exclusive d’Olivier Besancenot. Le journaliste évoque l’incrimination de la négation du génocide des Arméniens et demande si, prendre en compte, dans une action politique nationale, des revendications de nature catégorielle, ne serait pas prêter le flanc au « communautarisme » ? Besancenot répond : « Même si la loi dont vous parlez concerne l’Arménie, nous pensons qu’elle concerne tout le monde politique, et pas seulement la communauté. C’est bien pour cela que l’Assemblée nationale s’est saisie de la question. Dans la reconnaissance du génocide, nous voyons non seulement la justice pour les victimes et leurs descendants, mais aussi la possibilité de défendre tous les peuples qui sont victimes aujourd’hui, je pense par exemple au peuple palestinien. »
Quelle incroyable confusion des genres que voilà ?! Si l’on comprend bien Olivier Besancenot, la reconnaissance du génocide arménien viserait non seulement à rendre justice aux victimes de ce génocide (ce qui est tout à fait compréhensible par ailleurs et juste) mais elle pourrait stimuler, encourager, alerter, rassembler les militants du NPA (ou/et d’autres) pour défendre une (seule) cause : la cause palestinienne. Bref, le porte-parole de l’ex LCR -mais, ai-je bien compris ?-, pense qu’en reconnaissant l’atrocité du génocide arménien, on défendrait mieux les victimes palestiniennes !
D’où cette question : par quel tour de passe-passe grandguignolesque peut-on mettre sur le même plan les victimes d’un génocide et les souffrances des Palestiniens ? Un tour de passe-passe arithmétique peut-être ? Où il semblerait qu’il faille faire un parallèle entre un million et demi de morts d’un côté et le conflit israélo-palestinien ? A moins que le conflit au Proche-Orient soit tellement passionnel et irrationnel, que pour être politiquement correct il faudrait mentionner obligatoirement les souffrances des Palestiniens, lorsque l’on parle d’un ou des génocides ?
Vu maintenant dans les rues de Paris, le 24 janvier 2009, lors d’une manifestation pour défendre les Palestiniens (ou le Hamas ?), des slogans enflammés sont scandés, autant de comparaisons malhonnêtes, insidieuses et perverses. Des manifestants portent un grand panneau « Rien ne peut justifier un génocide ! ». Un peu plus loin, une femme brandit un pancarte, il est écrit : « S.S. = soldat sioniste !» avec une croix gammée et une étoile de David. Un peu plus loin toujours, « Israël aS.S.aS.S.in » (même croix gammée, même étoile de David). Plus loin encore, une femme arpente un « Israël criminel, halte au génocide ! ». Toujours plus loin, un homme brandit la maquette d’une roquette qassam du Hamas, plus loin toujours, un drapeau israélien, l’étoile de David est remplacée cette fois par un croix gammée.
Vous étiez dans cette manifestation Olivier Besancenot. Il est vrai que vous étiez juste devant, en tête du cortège. Vous n’avez peut-être pas tout vu et entendu ?
Mais, maintenant que vous savez, dénoncerez-vous ces slogans perfides ? Refuserez vous que l’on fasse le moindre amalgame entre un génocide et le conflit israélo-palestinien ? Direz-vous enfin qu’il n’est pas tolérable d’affubler les symboles nationaux, historiques et/ou religieux du judaïsme avec des croix gammées et les lettres de la S.S. ou de la gestapo, surtout après la Shoah ? Comprendrez vous que ces excès desservent la cause que vous défendez ?
Et si vous ne dîtes rien camarade, votre père idéologique, Léon Trotski -de son vrai nom Lev Davidovitch Bronstein- s’en retournera-t-il dans sa tombe ? Cette question vous paraît incongrue ? Tant mieux ! Je veux seulement vous rappeler que le Juif Bronstein savait ce que voulait dire une croix gammée. Il savait ce que les nazis faisaient aux Juifs. Et, je pense qu’il n’aurait jamais imaginé de son vivant que l’on colle des croix gammées à des étoiles de David ! Alors, oui camarade, on ne peut pas tout dire ! On ne peut pas brandir n’importe quoi, n’importe quelle image, n’importe quel slogan, n’importe quel texte ! On ne peut pas non plus salir impunément ! Et, il faut raison garder !
Camarade Besancenot, vous qui pensez et dîtes (aussi) combattre l’antisémitisme, j’ose espérer que vous y penserez la prochaine fois… !
Marc Knobel
crif