L'avenir d'une dénégation
« Je ne t’ai jamais emprunté ce chaudron, et d’ailleurs je te l’ai rendu, et puis, il était déjà percé au départ » (apologue de Freud, cité par Marcoroz).
27/11/09
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En cette sinistre époque de recrudescence de l’antisémitisme, les ennemis d’Israël, qui ne reculent devant aucune ignominie, ont eu l’idée de dénicher, parmi les détenus des prisons israéliennes, un voyou (que dis-je ? un terroriste) ayant la nationalité française, de le proclamer "prisonnier d’opinion" et de le comparer à Guilad Shalit. Cela me fait penser à Maurice Papon, lors de son procès, se comparant à Oskar Schindler.
On a pu assister, là encore, à un exemple de ce que Freud a appelé la dénégation. Rappelons cet exemple proposé par Freud : « Je ne t’ai jamais emprunté ce chaudron, et d’ailleurs je te l’ai rendu, et puis, il était déjà percé au départ ». Cette phrase, par les contradictions qu’elle contient, prouve que celui qui la prononce a bel et bien emprunté le chaudron (sinon il ne dirait pas qu’il l’a rendu) et que c’est bien lui qui a fait le trou (si le chaudron avait été percé au départ, il ne l’aurait pas emprunté ; ou alors, il ne pourrait pas le savoir).
En l’occurrence, la dénégation m’a sauté aux yeux quand je suis tombé sur un articulet de Wikipedia consacré au voyou en question, et manifestement écrit par un idéologue gauchiste « pro-palestinien ». Le Grand Rabbin Ovadia Yossef, cible de la tentative d'assassinat, y était qualifié de "controversé rabbin". On est censé comprendre que si ce rabbin est « controversé », cela atténue certainement la gravité du crime, ou, peut-être même que cela l’excuse ! Or, depuis, l’articulet en question a été légèrement retouché : le mot « controversé » a disparu [5]. On comprendra mieux, dans un instant, pourquoi.
Remarquons au passage que le terme "controversé" semble être venu compléter, depuis peu, la novlangue de nos idéologues en herbe : Avigdor Lieberman est qualifié de ministre "controversé", Ovadia Yossef de rabbin "controversé", etc. Les rabbins "controversés", il y en a eu apparemment un certain nombre dans l’histoire, à commencer par un certain Yehoshoua ben Yossef, dit Jésus. Mais ici, l’emploi de ce terme et son retrait subit, dans un "article" tendant à faire croire que Hamouri serait innocent, constituent un cas particulièrement intéressant.
En effet, la dénégation dont je parle, de la part des « défenseurs » autoproclamés de Salah Hamouri, pourrait se résumer ainsi : « Hamouri n’a participé à aucune tentative d’assassinat ; d’ailleurs, son rôle dans ce projet était un rôle de second plan, et puis, le rabbin qu’il s’agissait d’assassiner était un personnage controversé ».
Autre phénomène analysé par Freud, la projection, qui consiste à voir chez autrui ce que l’on a en soi-même. Nous avons aussi, dans cette affaire, un bel exemple de projection freudienne : des communistes et autres adeptes du totalitarisme qui voient des "prisonniers d’opinion" dans l’une des démocraties les plus exemplaires du monde.
© Marcoroz