Dis-moi ce que tu penses d’Israël, je te dirai quelle idée tu te fais de la démocratie.
« Le gouvernement Olmert est trop faible pour faire la paix ». C’est ce que vient de déclarer Mustapha Barghouti, le ministre de l’Information de l’Autorité palestinienne. On pourrait lui rendre la politesse en citant une interview qu’il donnait voici quinze jours seulement à une organisation pro-palestinienne française, Protection Palestine. Il y décrivait ainsi son propre gouvernement, constitué à la suite des accords Fatah-Hamas de La Mecque : « Nous avons mis en place cette coalition pour mettre fin aux violences factionnelles et éviter la désintégration de l’Autorité palestinienne. Les défis auxquels nous devons faire face sont considérables. Premièrement, il faut rétablir l’ordre et la sécurité à l’intérieur des territoires palestiniens en renforçant l’indépendance du pouvoir judiciaire. Il faut également initier de véritables réformes et mettre en place des institutions démocratiques afin de lutter contre la corruption, le népotisme et la répression politique ». Pas tout-à-fait ce que l’on entend par « gouvernement fort ». Encore moins ce que l’on appelle un « gouvernement démocratique ». Et pas du tout, si l’on suit le raisonnement de Barghouti sur Israël, un partenaire pour une paix, quelle qu’elle soit.
Le gouvernement Olmert est peut-être faible. Mais il l’est dans le cadre d’une démocratie qui fonctionne bien. La démocratie, ce ne sont pas les élections : n’importe qui peut être élu un jour, même Hitler. C’est la possibilité de critiquer et de renverser, par de nouvelles élections, un gouvernement élu. Les Israéliens critiquent Olmert. Un jour, ils voteront. Ils le renverseront peut-être. Ou peut-être pas. Voilà qui est à des années-lumière des sables mouvants politiques où se débattent – hélas ! - les Palestiniens en particulier et – deux fois hélas ! - les Arabes en général. Voilà aussi la véritable clé du conflit du Proche-Orient. Deux démocraties peuvent entrer en conflit, défendre leurs intérêts respectifs. Deux communautés, au sein d’une démocratie, peuvent s’affronter, s’opposer. Elles finissent toujours par imaginer un compromis. Entre une démocratie et une non-démocratie, en revanche, le compromis est impossible. Parce que ce sont des éléments chimiquement, ontologiquement, incompatibles. Comme le lacté et le carné dans l’alimentation rituelle juive.
Les Français ont la chance de vivre dans une démocratie. Ils vont élire leur président dans huit jours. Je leur conseille de se décider, entre autres facteurs, sur la question du Proche-Orient, parce qu’elle révèle – toujours un vocabulaire chimique – leurs options profondes. Deux des candidats principaux comprennent que la démocratie israélienne ne se range pas dans le même tiroir que les non-démocraties. Le troisième ne semble pas l’avoir compris. Le quatrième, n’en parlons pas.
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