C’est l’un des rares privilèges associés à ma fonction que de pouvoir choisir, en ce dernier jour de campagne officielle pour les présidentielles, un article consacré à un candidat qui a ma faveur, non sans quelques inquiétudes tout de même, mais… "rien n’est parfait", comme disait le Petit Prince. Au demeurant, je conseille à celles et ceux qui auraient l’intention de me faire grief de ce choix, de lire attentivement l’article de N. De Pape, expert incontesté en matière de politique. Ils constateront que son analyse est non seulement équilibrée, mais sans concession. Même s’il est clair que sa préférence va à N. Sarkozy, il ne se prive pas, pour autant, de souligner les faiblesses et les outrances du candidat et de poser des questions – qui ne sont pas uniquement rhétoriques - sur les capacités de N. Sarkozy à diriger le char de l’Etat. J’oserais ajouter - sans toutefois prêter ce sentiment à N. De Pape - que c’est peut-être parce que les autres candidats lui inspirent des doutes encore plus sérieux, que l’auteur de cet excellent article a focalisé son analyse sur celui d’entre eux qui lui paraît susceptible de causer le moins de dégâts à la France. (Menahem Macina).
Rarement un candidat à la Présidentielle française aura suscité autant de peur, voire de haine. Comparé tour à tour à Le Pen puis au régime de Vichy - “Sarkozy parle désormais comme Maurras” (Edwy Plenel) ; “Sarkozy a des accents vichystes” (Jean-Jacques Jespers) -, taxé de “néo-conservateur américain au passeport français” (argument de campagne du Parti socialiste), de “danger public” (Michel Rocard), d’“ultra-libéral” et, plus récemment, d'“eugéniste”, suite à ses déclarations sur le caractère inné de la pédophilie, Nicolas Sarkozy fait l’objet d’une diabolisation dont l’outrance le dispute au ridicule. Car comment cet homme pourrait-il incarner tous ces courants à la fois ? Parmi le Club des Diaboliques, ni Bush Junior, ni Benoît XVI, ni Berlusconi, ni Blair, ni Aznar n’ont subi à ce point les amalgames.
Le monde intellectuel et artistique l’abhorre littéralement, à quelques exceptions près. Dans le monde politique, la Chiraquie et une partie insoupçonnable de l’UMP souhaitent sa perte; à gauche, à l’exception de Bernard Tapie et Claude Allègre (qui se tâte), Sarkozy est le diable incarné. Mis à part TF1, Le Figaro et Le Point, la presse française dans son ensemble lui est défavorable. Marianne, Libération, Le Canard Enchaîné (et Le Soir, de Bruxelles) ont choisi leur camp.
Face à une campagne que l’on peut raisonnablement qualifier d’injuste, le couple Sarkozy, très astucieusement, ne cesse de rappeler, ces derniers temps, ses origines étrangères. Métèque parfait, Nicolas Sarkozy descend d’aristocrates magyars et de Grecs de Salonique, mi-chrétiens, mi-juifs. Petite fille du grand compositeur espagnol Isaac Albeniz, Cécilia Sarkozy a assuré très récemment “n’avoir aucune goutte de sang français”. Le peu d’insistance de Nicolas Sarkozy à parler de ses lointaines origines juives est déjà symptomatique d’un certain climat (duquel participe mêmement Dominique Strauss-Kahn, qui ne mentionne jamais sa judéité): un “sang-mêlé” à la Présidence de la République, cela sonne mieux et est plus populaire qu’un israélite, même très dilué.
On peut se demander d’ailleurs pourquoi Nicolas Sarkozy est allé serrer la main de Bush (eût-il serré celle de Ahmadinejad, qu’il n’eût certainement pas suscité une telle réaction, mais la main de Bush Junior, imaginez !), et pourquoi il s’affiche régulièrement comme “libéral” (un mot qu’il vaut mieux ne pas prononcer en France depuis deux siècles) puisqu’en définitive, il est loin d’être fan de Bush ou du libéralisme orthodoxe.
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