PARIS (AFP) - L'"autonomie réelle" des universités a été un des leitmotiv de la campagne de Nicolas Sarkozy mais sans précision sur ses intentions réelles, certains étudiants n'ont pas attendu son investiture pour y lire une volonté de sélection et de privatisation.
Le bref blocage du site de Paris I Tolbiac, et l'organisation d'assemblées générales dans plusieurs universités ont traduit leur volonté d'engager immédiatement un mouvement de contestation. Pour eux, il s'agissait aussi d'exprimer "l'émotion légitime", selon les termes de l'Unef, suscitée par l'élection du candidat de l'UMP alors que les "jeunes ont majoritairement voté pour Ségolène Royal".
"L'autonomie, je la veux aussi pour les universités, dans le recrutement des étudiants, des professeurs, dans la recherche des financements, dans les programmes, dans le droit de passer des partenariats avec les entreprises", avait déclaré Nicolas Sarkozy le 27 mars aux lecteurs de la Provence.
"Les mots +sélection+ et +privatisation+ n'ont jamais été utilisés par M. Sarkozy", a corrigé jeudi son entourage, en renouvelant la promesse d'une loi sur l'Enseignement supérieur a priori durant l'été.
"Un certain flou entoure certaines de ses propositions concernant l'Enseignement supérieur comme la sélection à l'entrée de l'université", a néanmoins insisté l'organisation étudiante Fage.
"Je pense que Nicolas Sarkozy veut une université à deux vitesses", a commenté de son côté le président du syndicat étudiant Unef, Bruno Julliard.
Outre la promesse d'"un effort cumulé de 15 milliards d'euros sur cinq ans" pour l'Enseignement supérieur, le candidat de l'UMP a fait des déclarations diverses sur la question au long de sa campagne.
Lorsqu'il évoquait une "autonomie réelle pour les universités volontaires", il a toujours cité une réforme de leur gouvernance - conseils d'administration resserrés, présidents d'université dotés de prérogatives, etc.
Comme il l'avait déjà fait à Limoges le 16 octobre 2006, il précisait le 16 février dans une lettre aux présidents d'université, que "l'orientation sélective ne doit plus être une question taboue". Il souhaitait alors "adapter les flux d'entrée dans chaque filière en fonction de la réalité des débouchés".
Dans ce même courrier, il prônait la liberté pour les université de "recruter leurs enseignants et leurs chercheurs et de moduler les rémunérations et les charges d'enseignements".
Reste à savoir si le président Sarkozy intègrera dans une loi l'ensemble de ces réformes, en l'état "inacceptables" pour Bruno Julliard comme pour les étudiants, souvent d'extrême gauche, qui ont anticipé ses intentions en tentant d'organiser une mobilisation cette semaine.
Reste à savoir également si le calendrier de ces réformes sera conforme aux prévisions.
"Il serait irresponsable de faire une loi en juillet, ça voudrait dire qu'il n'y aurait aucune concertation, aucune négociation, qu'il passerait en force", a ainsi prévenu le président de l'Unef, jugeant que, "sur une question aussi importante que celle-là, ça braquera tout le monde".
Il a affirmé que la conférence des présidents d'université (CPU) et l'Unef avaient appelé à ce que "la loi n'intervienne pas avant les Etats généraux de l'université organisés à l'automne".