Par Marc Knobel
Il y a quelques années, un film diffusé par la télévision allemande, « Hass im Kopf » (Avoir la haine), du scénariste Uwe Friessner, décrivait l'univers cauchemardesque de quelques uns de ces jeunes qui vivent dans une petite ville allemande tranquille. Ils sont vite entraînés dans une spirale de violence. Il s'agit d'abord, pour eux, de se forger une identité, au-delà, presque une « virilité ». Puis, tout s'enchaîne. Il faut prouver aux autres membres du groupe, sa détermination, sa force, cogner devient le leitmotiv, la raison d’être. La caméra s’attarde sur l’un d’entre eux. On le voit, soûl, invectivant des passants, crachant et hurlant. Il faut aussi trouver un coupable idéal, l'éternel bouc émissaire : ce sera le petit épicier turc de la rue. Et, dans cette spirale, comme cela ne semble pas leur suffire, les jeunes décident de profaner un cimetière juif. Ils font la fête, boivent et se félicitent d’un tel acte de « bravoure ». Ils iront jusqu'à assassiner sauvagement une vieille alcoolique qui, pourtant fréquente le groupe. Le scénariste ne veut pas excuser, il s'interroge, il tente de comprendre et au-delà, peint une société globalement indifférente
. Le téléfilm « L'école de la haine » du réalisateur allemand Hanno Bruhl, est tout aussi intéressant. Robin à 16 ans, cheveux roux et regard de chien battu. Entre un père parti refaire sa vie et une mère absente et agressive, la vie de Robin se délite. Il n'y a guère qu'avec Marie, sa petite sœur, que le dialogue et la tendresse subsistent. Mais cela ne suffit pas. Robin a soif de reconnaissance et surtout d'affection ; besoin de s'affirmer et de se mesurer. Des stimulations qu'il ne trouve ni à la maison ni dans l'univers protégé du lycée. Séduit par un camarade de classe qui ne cache pas sa xénophobie, il cède doucement. Pour finalement s'échouer chez Bernd, qui anime un réseau néonazi dans une cité bétonnée. L'accueil est chaleureux. Là, on est entre hommes : fraternité, solidarité, ordre et obéissance. Commence alors une descente aux enfers, rapide et violente...
Pour des milliers de jeunes gens de toute l’Europe, la violence ultra est devenue la règle. La bagarre est une sorte de rituel, le salut nazi peut devenir une tentation. Comment doit-on alors qualifier les nervis qui envahissent les pelouses ? Cognent-ils les supporters de l’équipe adverse ? Injurient –ils ou font-ils le salut nazi, et in fine ternissent-ils le football ? Que doit-on comprendre de leurs agissements ? Nous savons qu’ils développent une rage qui s’exprime avec une féroce brutalité. Ils s’identifient aussi aux nazis qu'ils découvrent le plus souvent en regardant de vulgaires séries télévisées et en feuilletant de grossiers fanzines et quelques petites bandes dessinées glauques. Le nazisme tel qu’il se le représente, apparaît à leurs yeux comme une « quête » purificatrice, d'une violence salvatrice. Devenus nazis, mais de pacotille, habillés de T-shirts et décorés par des têtes de mort, à leur tour, ces paumés veulent jouer aux petits soldats. Les groupuscules et les militants néo-nazis savent parfaitement utiliser ce filon. Les tribunes sont donc envahies par des supporters fous, éructant de haine.
la suite....
http://www.crif.org/?page=articles_display/detail&aid=8028&artyd=10&stinfo=416.506.68016