Extraits d’un article de Stéphane Juffa dans Menapress
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Bis repetita de l’indigné sur la fable de Gaza, "prison à ciel ouvert" ; le vieil homme était de ceux qui ignorent que la porte de cette geôle ouvre sur quatorze kilomètres de frontière commune avec l’Egypte islamiste des Frères Musulmans, eux-mêmes les créateurs et les mentors idéologiques du Hamas qui gouverne Gaza.
Or c’est un lieu commun de considérer qu’une prison dont la porte n’est pas fermée n’est pas une prison. Ou que si le Hamas connaît des problèmes avec Moubarak et Morsi, cela ne regarde pas Israël.
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Hessel se retrouve en position de hors-jeu quand, pour aller jusqu’au bout de sa haine de l’Etat hébreu, il prend la liberté de normaliser le nazisme en affirmant que "l’occupation allemande (de la France) était, si on la compare par exemple avec l’occupation actuelle de la Palestine par les Israéliens, une occupation relativement inoffensive".
A quoi Hessel trouvait naturel d’ajouter : "(…) abstraction faite d’éléments d’exception comme les incarcérations, les internements et les exécutions, ainsi que le vol d’œuvres d’art. Tout cela était terrible. Mais il s’agissait d’une politique d’occupation qui voulait agir positivement (…)".
Au Panthéon, dites-vous ?
Parce que cette "occupation positive" a tout de même coûté la vie, entre 39 et 45, à la bagatelle de 567 600 Français, soit à 1.35% de la population hexagonale de l’époque. Ce, tandis que toutes les guerres entre Israéliens et Arabes, depuis avant même la création de l’Etat hébreu, à partir de 1945, civils et combattants des deux bords confondus, n’ont pas tué plus de 60 000 êtres humains. Et que l’ "occupation" israélienne ne fait de victimes que fort occasionnellement.
Mais comment, pour rester dans les chiffres, Hessel peut-il parler de la sorte d’un conflit mondial ayant anéanti entre 60 et 70 millions d’individus ? Et comparer favorablement les dégâts du nazisme à la politique de l’Etat démocratique d’Israël ?
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Nous en tirons un double enseignement. D’abord, il est à nouveau possible, dans la France du début de ce XXIèmesiècle, de stigmatiser Israël et les Juifs sans avoir besoin d’étayer ses propos. Fustiger l’Etat hébreu en le comparant, par exemple, défavorablement au IIIème Reich ne suffit plus à relativiser le jugement des journalistes, des intellos et des hommes politiques bleu-blanc-rouge sur l’auteur d’une telle comparaison.
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En écrivant ce qu’il a écrit sur la douceur de la vie sous les Boches, en imputant artificiellement à la nation juive une cruauté supérieure à la leur, en faisant, de la sorte, d’Israël le repère symbolique du mal absolu, on réalise une sorte d’exorcisme nauséabond et terriblement dangereux, rétroactif, du droit qu’auraient pu avoir les grands-parents de détester les Juifs sans avoir de raison à présenter. Et pourquoi pas, celui de ne pas être braves et de les livrer aux Allemands ou de copuler avec eux.
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