Ca expliquerait, notamment, l'ahurissante déclaration d'Ehoud Barak hier.
Iran: une attaque israélienne imminente'
Israël serait-il sur le point de lancer son attaque contre l'Iran dans les prochaines semaines, voire dans les prochains jours ? La fébrilité dans les milieux militaires tend à accréditer cette thèse et les références sur les guerres passées illustrent cette hypothèse dramatique. Des faits troublants viennent étayer l'hypothèse d'une attaque imminente.
Israël avait bombardé le réacteur syrien en septembre 2007 juste au moment où la production de matière fissile devait commencer. Les Syriens ne pouvaient pas franchir ce cap sans créer une situation irréversible car la matière produite en grande quantité pouvait être alors stockée en différents endroits protégés, repartis à travers tout le pays, rendant son élimination quasi impossible. Deux experts américains de l'Institut pour la science et la sécurité internationale à Washington, son président, David Albright et son directeur adjoint Corey Hinderstein, ont situé à 2009 la production d'uranium hautement enrichi par la méthode de l'ultracentrifugation. Par ailleurs, l'administration américaine a confirmé que l'Iran est à quelques mois de la production en masse de matière fissile.
Le voyage de Netanyahou à Moscou ne laisse pas d'étonner. Il devait être totalement secret mais la presse en a divulgué son existence. Connaissant la phobie des services israéliens de protection, il n'est pas dans les habitudes du premier ministre de voyager incognito dans un jet privé qui le rend vulnérable. L'objet de ce voyage de dix heures, si urgent, n'a pas été dévoilé alors qu'aucun contentieux n'existe avec la Russie pour le justifier. Les supputations vont donc bon train et l'hypothèse la plus probable tient dans la volonté du premier ministre israélien d'informer le président russe de ses intentions imminentes afin de ne pas subir de réaction militaire de la part de la deuxième puissance mondiale.
Quelques jours après cette visite impromptue, la campagne d'intoxication du ministre de la défense Barack semble grossière. Il a donné en première page, le 17 septembre, une interview en première page du journal israélien Yédiot Aharonoth dans laquelle il précise: «un Iran nucléaire ne serait pas une menace vitale pour Israël». Cette déclaration est contraire à la doctrine martelée par tous les officiels israéliens qui ne laissent jamais passer un jour sans évoquer le danger iranien. Cela rappelle étrangement les déclarations rassurantes de Moshé Dayan, le 3 juin 1967, niant toute attaque préventive quelques jours avant de lancer la Guerre des Six Jours le 5 juin. «Nous sommes à la fois en cet instant un peu en retard et un peu en avance. En retard pour réagir par la force et en avance pour tirer une conclusion des efforts diplomatiques en cette affaire». Il avait ainsi endormi la méfiance de ses ennemis.
Ehoud Barack est avant tout un militaire et sa tactique est toute aussi militaire. Il lance ses attaques au moment où on l'attend le moins car il veut toujours bénéficier de l'effet de surprise. L'évacuation du Beth-Hashalom à Hébron, occupée par des colons, a suivi en tout point sa technique de diversion. Tandis que les jeunes nationalistes affluaient vers le lieu de l'évacuation, il leur a promis une réunion de conciliation pour le dimanche suivant, après la réunion du Conseil des Ministres. En conséquence, les jeunes ont évacué le bâtiment croyant que rien ne se passerait d'ici la date fixée. L'évacuation fut ordonnée par surprise le jeudi, contre toute attente, et dans le calme absolu.
La configuration est identique avec l'Iran. Les Etats-Unis attendent une réponse de Téhéran sur la question nucléaire prévue pour fin septembre sachant pertinemment que la réponse sera négative. Une fenêtre de tir reste donc probable jusqu'à la fin du mois tant que les iraniens se sentent protégés par le calendrier qu'ils ont fixé.
Les vacances scolaires débutent le 18 septembre en Israël pour une durée de trois semaines en raison des fêtes juives de la nouvelle année. Les écoles sont fermées et les enfants vivent à l'abri chez eux. Le moment semble donc propice pour une action puisque la population la plus fragile pourra se protéger en cas de représailles éventuelles de l'Iran ou du Hezbollah. Par ailleurs, l'activité tourne au ralenti pendant ces fêtes et l'impact économique sera donc considérablement réduit. Il s'agirait en quelque sorte d'une guerre du Kippour inversée. Les Arabes avaient attaqué en 1973, à la même période, pour avoir les coudées franches et ce moment peut être choisi par Israël pour agir dans la surprise générale.
Enfin un accident, non commenté par l'armée, suscite quelques questions dont les réponses n'ont pas été données. Le crash de l'avion d'Assaf Ramon le 12 septembre dernier, fils du cosmonaute Ilan Ramon disparu dans l'explosion de la navette spatiale Columbia, n'est à ce jour pas expliqué. Son père avait fait partie de l'escadrille qui avait bombardé Osirak en 1981. Le capitaine Assaf, meilleur pilote de sa promotion, a étonnamment perdu le contrôle de son avion mais les observateurs se demandent quel genre d'entrainement il effectuait et s'il n'était pas tenu d'exploiter son F16 en dépassant les limites techniques acceptables. Il est fort probable qu'il avait été sélectionné pour honorer la mort de son père en rééditant son exploit. Cet accident nous rappelle celui qui est intervenu dans le Néguev en 1992 où plusieurs militaires des forces spéciales ont trouvé la mort alors qu'ils s'entrainaient à préparer l'assassinat de Saddam Hussein à l'occasion de l'enterrement de son oncle.
Néanmoins il est fort probable que si l'attaque avait lieu dans les jours ou semaines à venir, les militaires et les dirigeants israéliens observeraient, comme pour la Syrie en 2007, une discrétion totale, sans fanfares ni déclarations tonitruantes. Israël ne tient pas à acculer l'Iran dans une action suicidaire et il n'a aucun intérêt à placer les Etats-Unis ainsi que les membres du Conseil de Sécurité dans une position embarrassante. Il ne cherche pas à faire un coup d'éclat médiatique puisque son unique objectif reste de repousser le danger qui menace sa population. Il fera donc passer l'opération comme un bombardement de routine ou une simple incursion préventive afin de préserver l'honneur de la partie adverse.
Jacques Benillouche