Billet d'humeur paru dans l'hebdomadaire israélien, "Israël-L'Enjeu", n° 32 du 12 janvier 2007.
On raconte qu’en tombant sous les coups de dagues des conjurés, au nombre desquels se trouvait Brutus, son protégé, César se serait écrié : « Tu quoque, Fili mi ! » (Toi aussi, mon fils !).
Mais autres temps, autres mœurs. S’il doit avoir lieu, le meurtre politique d’Olmert – pour peu que Livni y participe - se fera à coups d’épingle, à coup de phrases et d’insinuations assassines. D’ailleurs, il semble que la curée soit déjà en vue : Tsippi n’a-t-elle pas confié à Ha’aretz qu’elle avait son propre plan de paix ? Les détails en ont déjà été jetés en pâture au public, dans une copieuse interview reproduite par le quotidien.
L’appétit vient en mangeant, tout court. L’appétit politique, lui, vient en mangeant à la table du chef du gouvernement. Au début, quiconque y accède en éprouve tellement d’assurance et de vanité, qu’il se laisse nimber par l’aura du chef. Il ne lui viendrait pas à l’idée de le contester, et encore moins de tenter d’empiéter sur ses prérogatives. C’est l’idylle. Comme toutes les idylles, plus même que celles qui ont l’amour pour aliment, les engouements politiques se fanent. Mais, contrairement à ceux de l’amour, leurs désenchantements excitent l’appétit de pouvoir des concurrents. Normal : les fausses manœuvres, les impairs, c’est le chef qui les commet, ou en endosse la responsabilité. Ceux qui sont censés partager sa tâche comptent les coups qu’il reçoit, notent cruellement les marques laissées sur son visage et son comportement, et commencent à prêter l’oreille aux ragots les plus contradictoires. « Il hésite trop ». « Il fonce sans réfléchir ». « Il cède tout aux Palestiniens ». « Il décourage les Arabes modérés ». « Il n’écoute personne ». « Il écoute n’importe qui ». Etc.
Enfin, vient le temps où le vizir se verrait bien calife, surtout quand on lui susurre fielleusement : « Voyez comme il s’y prend mal. Qui le soutient encore au sein de son propre cabinet ? Ah, si vous dirigiez le pays, ce serait autre chose… »
C’est peut-être ainsi que l’idée vint à Tsippi.
Quoi qu’il en soit, son charisme personnel et ses prestations diplomatiques plus qu’honorables lui ont valu la considération de plusieurs dirigeants politiques mondiaux. Il n’en fallait pas plus pour éveiller une libido politique dont elle-même n’avait probablement pas mesuré l’ampleur, et que ne satisfait plus un poste inférieur à celui de Premier ministre.
Reste à voir si les Israéliens auront pour Tsippi le regard des Français pour Ségolène.
http://www.upjf.org/actualitees-upjf/article-12360-142-7-quoque-tsippi-mi-menahem-macina.html