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Comment les colons s¹emparent illégalement de terres en Cisjordanie
Meron Rapoport
Traduction : Gérard pour La Paix Maintenant
Les colonies de Cisjordanie ont agrandi leurs juridictions administratives
en prenant le contrôle de terres palestiniennes privées et en les allouant à
des colons. Ce que l¹Administration civile qualifie elle-même de "vol" s¹est
déroulé de manière parfaitement planifiée, et sans aucune autorisation
officielle.
Pour la première fois, cette méthode a été rendue publique à l¹occasion du
témoignage d¹un habitant de la colonie de Kedoumim, Michael Lesence, lors
d¹une audience d¹appel contre un ordre de l¹Administration civile d¹évacuer
3,5 ha de terres près d¹un quartier de Kedoumim. Les registres officiels
montrent que ces terres appartiennent à des Palestiniens du village de Kafr
Qaddum.
L¹avocat de Lesence a admis à l¹audience que les terres en question étaient
des biens palestiniens privés. Toutefois, Lesence en revendique la propriété
au motif qu¹il les cultive depuis plus de dix ans, après les avoir reçues en
bonne et due forme, forme assortie d¹un accord écrit, de la part des chefs
du conseil municipal de Kedoumim.
Des représentants de l¹Administration civile déclarent en revanche que
Lesence n¹a commencé à cultiver ces terres que depuis six mois. Les avocats
Michael Sfard et Shlomi Zecharia, qui représentent les propriétaires
palestiniens au nom de Yesh Din ­ Volontaires pour les droits de l¹homme,
soulignent que leurs clients ont continué à cultiver leurs terres, et que
l¹armée et les colons de Kedoumim leur en ont interdit l¹accès.
Les habitants de Kedoumim ont affirmé devant le jury que les Palestiniens
n¹avaient aucun problème à accéder à leurs terres. Mais une visite de la
zone révèle une situation bien différente : le garde posté près de la zone
en question annonce « qu¹il est interdit de laisser les Arabes » pénétrer
sur les terres proches de ce quartier de Kedoumim. Quand les Palestiniens se
sont approchés de ces terres à pied, une patrouille de l¹armée est arrivée
sur les lieux et les a évacués. Averti de l¹existence de documents prouvant
que les Palestiniens étaient bien propriétaires, l¹officier a répondu : «
Les documents ne m¹intéressent pas. »
Cette méthode d¹appropriation de terres s¹est développée à Kedoumim et dans
les colonies environnantes vers le milieu des années 90, après les accords
d¹Oslo, et continue jusqu¹à ce jour.
Zeev Mushinsky, « coordinateur des terres » au conseil municipal de
Kedoumim, a témoigné de la manière de faire : les employés du conseil
municipal, Mushinsky dans ce cas précis, relevaient sur une carte les
"terres abandonnées" autour des colonies, même si elles se situaient hors de
leur juridiction, avec pour objectif de s¹en emparer. Le conseil municipal
"allouait" lesdites terres à des colons, qui signaient un document officiel
selon lequel ils déclaraient n¹avoir aucun droit de propriété, et que le
conseil pouvait les évincer quand il le jugeait bon, avec à la clé des
indemnités correspondant uniquement aux investissements effectués pour la
culture de la terre.
Michael Bar-Neder, ancien responsable de la sécurité à Kedoumim, a reconnu
sous serment que cette « allocation » de terre était suivie d¹un effort
d¹agrandissement de la colonie. Selon lui, une fois que les colons s¹étaient
saisis des terres, une demande était envoyée au commandement militaire pour
que la terre soit déclarée terre d¹Etat, car selon cette loi, qui s¹applique
en Cisjordanie, quiconque ne cultive pas sa terre pendant trois ans renonce
de fait à son droit de propriété (1).
(1) Pour comprendre plus précisément ce mécanisme, qui utilise le droit
ottoman, et plus généralement sur ce sujet, voir "Les terres volées aux
Palestiniens : rapport de Shalom Arshav sur la construction des colonies sur
des terres privées palestiniennes"