NOMB. 20 :1-13 : Eaux de Méribah.
Il parait difficile de comprendre que Dieu punisse Moïse et Aaron d´entrer en terre promise car ils auraient oublié de sanctifier l´Eternel aux eaux de Mériba d´autant que Moïse n´en était pas à sa première querelle avec le peuple qui ne cessait de se plaindre du manque de nourriture, du manque d´eau, de manque de melons et de concombres, du trop de manne, et qui menaçait sans cesse de retourner en Egypte. Il en était en effet aigri.
Cette épine semble illustrer en fait l´antagonisme entre la source J (jahviste) et la source P (sacerdotale) qui a présidé à la rédaction du livre des Nombres. Peut-être s´agit-il d´une confusion avec le récit du frappement du rocher contenu en Exode car le site de Qadesh Barnéa était dans l´antiquité bien pourvu en eau ?
Peut-être cet épisode est-il destiné à expliquer pourquoi Moïse ne franchira pas le Jourdain ?
Cet épisode nous enseigne qu´Israël ne doit pas s´installer dans ce régime de facilité. Il doit savoir qu´une fois conscient de la protection de Dieu, il aura à prendre toute sa part dans l´édification de son avenir, dirigée uniquement par l´idée que la parole divine lui a communiquée. En d´autres termes, le bâton du frappement du rocher, symbole du miracle, doit maintenant faire place à la parole. Et c´est cela que Moise n´a saisi qu´insuffisamment. Moise était par trop accoutumé à s´appuyer sur les interventions directes de Dieu pour pouvoir être le chef du peuple à partir du moment où ces interventions deviennent extrêmement rares et où l´esprit de décision du peuple et la connaissance de la volonté de Dieu révélée auront à donner leur mesure entière. Il est donc beaucoup moins question d´une punition que d´une relève à laquelle Moise doit consentir. Moise aura été l´homme de l´Egypte, de la mer du jonc, du Sinaï, du désert. Josué sera l´homme de la conquête, l´homme politique. Et c´est exactement ainsi qu´il faut entendre le verset 12 du chapitre 20 dans lequel Dieu reproche à Moise de ne pas avoir su le sanctifier à l´occasion de l´incident de l´eau. Car la vraie sanctification de Dieu par l´homme ne se fait pas par l´obéissance en présence du miracle (acte de valeur morale insignifiante) mais par le libre consentement en l´absence de toute intervention miraculeuse, à la parole divine. C´est la ce que le Judaïsme appelle « emouna », confiance, acte de foi, c´est là que le peuple passe de la phase de l´enfance à celle de la maturité.